Comme un air de gueule de bois
Malgré les quatre années qui les séparent Ultra ressemble beaucoup à Songs Of Faith And Devotion. Toujours cette orientation rock teintée d'electro pop et cette omniprésence de la religion. Sauf qu'entre temps Dave est devenu limite junky, a tenté de se suicider et Alan Wilder s'est barré. Ambiance de merde à l'approche des années 2000. On sent qu'Ultra est né dans la douleur (ou dans la torpeur, voire les deux). Sur douze titres : trois instrumentaux. Ce qui sent bon la solution de facilité. Dave n'a pas l'air hyper impliqué. Il a la voix qui grippe un peu et quand il tente des envolées on lui met un gros effet de distorsion pour cacher les imperfections ("barrel of a gun"). Même les textes semblent englués dans un flou artistique des plus complets. Sincèrement de quoi parle "sister of night"? Les chansons sont plutôt lentes voire parfois carrément molles. Ce disque sent bon les embruns d'alcool, la fatigue, parfois la fainéantise et une difficulté à se renouveler. Parce que si dans l'ensemble Ultra est un très bon disque, avec quelques grands titres ("it's no good", "useless", "insight" et les deux meilleures chansons chantées par Martin Gore jusque là : "home" et "the bottom line") on a l'impression que l'époque "Depeche Mode version rock" s'achève. Une époque bénie, ponctuée par quatre albums mais qui montre ses limites en terme de renouvellement. Ultra, qu'on se le dise, est un Songs Of Faith And Devotion 2.0 (où le gospel est remplacé par le jazz).
Je pense que les trois gars de Depeche Mode ont voulu montré qu'ils étaient encore bel et bien là et, n'ayant pas trop la force de repenser totalement leur son, sont partis sur quelque chose qu'ils connaissaient déjà et qui avait déjà fonctionné. Et ça fonctionne encore...mais un peu moins bien.