Vous avez l’ouverture d’esprit ? Tant mieux, parce qu’il en faut pour suivre Marc-Antoine Mathieu dans ses expérimentations surréalistes avec Julius Corentin Acquefacques prisonnier des rêves et en particulier dans ce quatrième épisode, le moins marquant à mon avis, dans cette série hors normes. Le début de la fin pour JC ? A moins que ce soit la fin du début…


Ce n’est pas une nouveauté, Mathieu a décidé d’explorer la logique de l’absurde. Ainsi, le nom du personnage central, Acquefacques (AKFAK) est une manière phonétique de dire Kafka à l’envers. Dans le monde kafkaïen où vit JC, Marc-Antoine Mathieu s’amuse ici à faire passer son anti-héros de l’autre côté du miroir (référence explicite à Lewis Carroll). Comme Alice, JC est confronté à un monde absurde. Julius Corentin observe (donc il s’en rend compte) que pour lui désormais, tout se passe à l’envers (y compris ses actes) et bien évidemment quand il tire à pile ou face, son choix n’est jamais celui qui sort.


Si cet album déçoit (légèrement), c'est par rapport au reste de la série. Il faut dire que Marc-Antoine Mathieu place toujours la barre très haut. Son imagination reste hors normes et le dessin en noir et blanc d’excellente qualité. L’humour est à la hauteur, avec de nombreux jeux de mots et quelques situations très bien amenées. Ceci dit, avec sa volonté d’explorer l’envers du décor, l’auteur se limite lui-même avec un album en 48 planches qui constituent deux parties distinctes, chacune reprenant les mêmes thèmes (avec les péripéties se faisant écho), raccourcissant automatiquement le scénario. Cette fois, JC ne se déplace plus en taxi, il emprunte les transports en commun dans des wagonnets qui rappellent immanquablement Indiana Jones et le temple maudit le film de Spielberg. C’est évidemment spectaculaire, mais vraiment dans le même style que ce qu’on observe dans l’album précédent (utilisation du vélo-taxi). La péripétie dans l’anneau de Möbius n’apporte pas grand-chose (sinon que Mathieu se fait plaisir). Le meilleur épisode est à mon avis quand JC va voir un spécialiste qui réussit à le retourner complètement (malheureusement il oublie le chapeau). Le visage de JC apparaît alors tout noir, comme sur le négatif d’une photo.


Le plus réussi dans l’album est la partie centrale où JC passe de l’autre côté du miroir. A ce moment-là, Marc-Antoine Mathieu imbrique les deux pans de l’histoire de manière à ce que le lecteur comprenne ce qu’il doit faire avec l’album (il suffit de l’avoir entre les mains avant de l’ouvrir pour deviner). Le point positif est que le lecteur n’est pas perturbé par l’imbrication des deux histoires. Le lecteur apprécie également de découvrir les points qui se retrouvent de chaque côté du miroir. Par contre, l’esquisse de poursuite de l’histoire en feuilletant les pages normalement du début à la fin tourne court, malgré le décor inversé de la planche -5.


Marc-Antoine Mathieu déborde toujours d’idées originales. Cet album a sa place dans la série, mais je le trouve moins brillant que les précédents.

Electron
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le 2 août 2014

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Electron

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