Pour qu’on soit d’accord, j’appellerai l’Épaisseur du miroir l’album dans son ensemble (c’est le titre qui se trouve sur le dos de couverture), « Le Début de la fin » le premier récit (celui qui commence au début, numéroté de la planche 1 à la planche 25) et « La fin du début » le second récit (celui qui commence à la fin, numéroté de la planche –1 à la planche –23). Bon, ça n’est pas très clair. En fait, la série des Julius Corentin Acquefacques n’est pas toujours claire. Ce n’est pas un défaut ici. Autant ce n’est pas une série pour enfants, autant je pense qu’il faut accepter de la lire comme savent vivre les enfants, c’est-à-dire sans tout comprendre.
Le Processus était une histoire qui ne présentait pas vraiment de fin. En dépit de leurs titres, ni « le Début de la fin », ni « la Fin du début » n’en présente non plus. Et pour le coup, ça laisse un léger arrière-goût d’inachevé.
Ce qui retient l’attention dans cet album, ce sont plutôt les détails. Ainsi, la barque sur laquelle notre héros navigue en rêve au début du « Début de la fin », s’appelle le CHOIX. Si l’on crée un axe de symétrie horizontal avec le mot CHOIX, ça donne CHOIX. Du coup, comme le nom de la barque se reflète dans l’eau, le reflet laisse lire CHOIX. Ça semble un peu con, dit ainsi, mais c’est assez représentatif de l’univers de la série : les détails y font souvent sens (1).
Le thème de l’album, on l’a compris, c’est la géométrie. Il y a, par exemple, une planche 15 construite selon une symétrie quasiment parfaite, « Cette symétrie dont le miroir est un symbole » (pl. 27). On trouve ailleurs (planches 10 à 11) une « rocade de Möbius » ferrée.
Tout le reste est une exploitation systématique (et donc parfois un peu décousue) du thème de la symétrie et de l’inversion. C’est vrai pour la construction en miroir des deux récits, jusque dans leurs titres. C’est vrai aussi dans chaque récit, à l’image du « Bottin de la Cité » de la planche –14 qui ne répertorie que des palindromes (avec une erreur (volontaire ?) chez Maxime Emiame). Voir encore, à la planche 15, un homme invisible dont le visage se reflète dans un miroir – c’est-à-dire l’exact inverse de ce qui arrivera à notre héros quelques cases plus tard. On ne voit qu’un morceau de paire de lunettes. Quand je vous parlais de détails…


(1) Dans le même ordre d’idées, les journées des six Julius Corentin Acquefacques parus à ce jour ne comptent que dix heures. En tout cas les cadrans d’horloge vont de I à X. Sauf dans l’Origine, où elles comptent bien douze heures. (Oui, j’ai dû lire deux ou trois fois chaque album et je ne m’en aperçois que maintenant…) Et peut-être le seul fait qu’on trouve au moins un cadran dans chaque épisode a-t-il un sens – je ne sais pas, une histoire de mécanisme, par exemple, ou de temps de lecture…

Alcofribas
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le 8 janv. 2019

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