L’Égypte Est Sienne

Les premières pages, sépias, du présent volume sont la véritable genèse de cette série.
Il y a plusieurs milliers d’années quelque part sur Terre, un village néandertalien est attaqué par un clan de Cro-Magnon. Avant de mourir, grand-père Loup confie ses quatre ivoires de magie à quatre enfants du village ravagé. De suite, la colère les mène à la vengeance : ils exterminent leurs agresseurs. « Tout commença et nous avions déjà échoué ». C’est ça L’Histoire Secrète, le récit des affrontements de quatre archontes aux nombreux pouvoirs à travers les siècles, au cœur de l’histoire humaine qu’ils tentent de manipuler espérant se modeler un futur favorable. Quatre frères et sœurs dressés les uns contre les autres.

En Égypte, la révolte des esclaves oppose Pharaon à Moïse et à son frère Aaron. En apparence. En coulisse, Erlin, archonte à l’ivoire du bouclier, s’est pris d’amitié pour Moïse et son peuple hébreux, l’éduque et les soutient, tandis que son frère Dyo prétend mettre son ivoire de la coupe et son orgueil combattant au service du souverain égyptien. Nil en sang, bataillon de loups, crue soudaine et cohortes de golems, les armées des deux sorciers s’affrontent dans le sang. Entre le glaive et la sorcellerie, la bataille occupe l’épisode presqu’entier, jusqu’à ce que Moïse fuit, ouvrant la Mer Rouge au nez de Dyo à l’aide de l’ivoire qu’il lui a dérobé. Un scénario simple, linéaire si ne sont les quelques séquences plus au sud, où Reka et Aker évoluent en retrait de l’action en donnant un bref aperçu de leurs caractères. Intéressant mais aux personnages trop survolés pour qu’on puisse s’y attacher, choisir un camp. Sympathique sans être passionnant.

Le dessin d’Igor Kordey est agréable mais pas extraordinaire, et les riches et judicieuses couleurs de Carole Beau y apportent beaucoup. Le trait est souvent grossier dans les décors et les arrière-plans, presque bâclé sur certains plans d’ensemble, l’artiste ne s’embarrasse pas de trop de détails, mais les portraits, heureusement, sont précis et réalistes, parfois même explicites dans l’expression. C’est suffisant à suivre le récit mais trop peu pour s’emballer.

Autant les premières pages posent un important intérêt au projet, autant l’épisode développé n’appelle pas l’impatience. Ce premier titre de L’Histoire Secrète est de relativement bonne facture quant au scénario, linéaire mais aux enjeux clairs, un peu décevant quant au dessin.

 Matthieu Marsan-Bacheré