Sur Akbar, la menace plane, une jeune fille en semble consciente, qui déjà se prépare au départ. 


 C'est aujourd'hui que je sors de ma tanière et m'offre à
l'aventure. 



Dès la première page de La Quête de l'Oiseau du Temps, Serge Le Tendre et Régis Loisel posent l'ambiance crépusculaire et le décor moite, rongé, d'une saga devenue culte avec une forme de maestria introductive où l'intrigue énoncée arque soudain toute la tension narrative du récit à venir. Ce premier tome abordé, il ne se lâche plus un seul instant : dans les pas de la généreuse Pélisse aux premières fleurs d'une adolescence niée, le lecteur embarque dans l'aventure et part à la rencontre des autres protagonistes du récit qui point, autant qu'à la conquête de La Conque de Ramor, sans savoir jamais où y poser son souffle. 


Épique.



De la retraite paisible du vieux Chevalier Bragon aux eaux calmes du fleuve Dol, la rousse héroïne et son petit animal à la fourrure bleue chamboulent l'apparente tranquillité des Marches d'Akbar à coups de charmes et de sortilèges, à coups de faucheuse et d'ardeur, à force de caractère et d'envoûtements. Embarquant ledit chevalier râleur et renfrogné à l'assaut d'une relique sacrée, c'est bientôt tout un peuple que la pucelle affole aux Marches des Terres Éclatées. Serge Le Tendre, sous les niaiseries qui feront la marque de l'héroïc-fantasy franco-belge, tisse 


un récit passionnant autour de personnages habilement différents, forts.



Et nous séduit d'abord grâce à eux. Son sens narratif distille ainsi dans leurs frictions les enjeux sous-tendus de la quête sans jamais oublier d'y ancrer un humour tendre, terriblement attachant.
Paysages sculpturaux et décors escarpés au couteau, faune fantastique peuplée de volatiles lugubres et de carnivores imposants, courbes des corps et caractères francs sous les costumes moyenâgeux, peuplades anthropomorphes aux faciès délabrés ou bestiaux, Régis Loisel relève avec talent et force imagination le riche challenge posé par l'univers et imposé par le récit. Les personnages sont de suite inoubliables, impriment immanquablement leur marque à la rétine et imposent d'emblée le nom du jeune dessinateur, dont le talent n'aura de cesse de nous inviter dans ses rêveries futures : l'expressivité y est reine.



L'artiste démontre un rare sens du corps, impressionnant.



Les couleurs de François Lapierre finissent de patiner l'ouvrage, nous happant littéralement dès les premières cases et à chaque nouvelle ambiance : brumes subrepticement dévorantes, éclats ensoleillés soudains sur perles de sang, lourdeur moite et ombragée des sous-bois, il y a un équilibre idéal qui tient là la cohérence et la vraisemblance d'un univers qui se veut presque familier. Palpable.


La Conque de Ramor ouvre avec efficacité la saga de La Quête de l'Oiseau du Temps : les personnages se rencontrent, se jaugent, s'affrontent – se dévoilent doucement – tandis que l'épopée démarre sans attendre, nous promettant à chaque nouveau volume à venir, une nouvelle étape angoissante et inattendue, mais complète, qui nous mène un peu plus près du bel Oiseau promis. Entre magie et oracles, parsemé d'affrontements chevaleresques et d'échanges de mots qui le sont moins, avec un enthousiasme à vif, plein de promesses, autant qu'une tendresse naïve, source de petites pépites, ce récit ouvre l'attention et la curiosité 


en touchant l'imagination où le plaisir de l'évasion les capture.



La Conque de Ramor est l'embarcadère idéal.

Créée

le 8 janv. 2019

Critique lue 152 fois

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