Soit juste un shonen, ne fait pas semblant d'être plus

En voilà une oeuvre qui m'a bien moins marqué à ma seconde lecture!

Lors de ma découverte, j'avoue avoir été très fan du concept. Simple, efficace et surtout je voulais du combat intéressant et j'ai été conquis.

Cependant, 15 ans sont passés et ma relecture a été bien plus complexe que prévus, à cause de plusieurs facteurs. Des points qui ne font pas de ce manga une mauvaise lecture, mais certainement pas la légende que j'avais cru lire à l'époque.

Le Nouvel Angyo Onshi, c’est un drôle d’objet. Un faux manhwa qui joue avec les codes du manga japonais tout en étant signé par deux auteurs coréens. Très honnêtement, au-delà de l’étiquette, on sent que les mecs ont grandi avec les mangas des années 90-2000 et qu’ils avaient clairement envie d’en faire partie. Le résultat ? Un manga qui cherche un peu sa voix, mais qui finit par trouver un certain souffle, surtout sur la fin.

C'est la belle copie, chose qu'on rate encore beaucoup en France, avec quelques oeuvres qui veulent être du manga, mais qui ne font que l'effleurer.

Graphiquement, ça en impose. C’est sombre, dense, très bien maîtrisé sur les poses et les corps, même si le début fait sourire avec ses têtes un poil trop cartoonesques. Puis y’a une vraie générosité dans la mise en scène, dans les combats, toujours bien amenés, parfois même originaux. C’est loin d’être fade. Par contre, côté découpage, on est sur un premier jet. Trop de gros plans, des cadrages parfois mal sentis… Mais rien de vraiment gênant, surtout quand on voit l’évolution fulgurante du trait d’un tome à l’autre.

Ce qui m’a un peu perdu au départ, c’est ce flou autour de l’univers. On est jeté dans un monde pseudo-fantastique vaguement inspiré d’un Moyen-Orient féodal coréano-nippo-truc, sans vraiment savoir où ça va. Et on sent que l’auteur non plus ne sait pas trop. Il teste une structure de manga à mission, avec un héros itinérant qui règle des comptes et libère les opprimés. Puis petit à petit, on glisse vers quelque chose de plus sérieux, plus global, avec de vrais enjeux. Passé les deux premiers tomes, là, j’avoue que j’ai mordu. C’est convenu, mais ça marche. Le vilain charismatique qui s’annonce, les mystères sur le passé, les trahisons, tout y est. C’est un puzzle classique mais plutôt bien assemblé.

Le vrai problème qui a rendu la lecture douloureuse pour moi, c’est Munsu. Présenté comme un antihéros? Il ne l’est pas. C’est un héros. Un gentil qui fait semblant d’être un méchant.

Il râle, il grogne, il tue parfois… mais toujours pour la bonne cause. Il est du bon côté de l’histoire, sans nuance. Et tous les personnages autour sont là pour l’encenser, sans vraiment exister par eux-mêmes. Ils gravitent, ils accompagnent, mais ne brillent jamais seuls. C’est dommage, parce que le récit avait la place pour creuser, pour nuancer, pour poser des questions plus fortes.

En fait, Le Nouvel Angyo Onshi est un shônen pur jus. Il se déguise un peu, il tente de se donner une profondeur qu’il n’a pas vraiment, mais au fond, c’est un récit d’action et d’honneur, avec un gars badass au centre, des ennemis qui deviennent amis, un grand méchant à affronter et un dernier acte explosif.

Et ça, il le fait bien! Vraiment le dernier arc m’a clairement scotché. L’intensité monte, les planches deviennent magnifiques, et l’auteur parvient à clore son histoire avec panache. Rien de révolutionnaire, mais une belle montée en puissance.

Je ne lui en veux pas pour son manque de fond. Ce n’est pas une œuvre à thèse, ni un manga à message. Il veut impressionner par la forme, et il y arrive souvent. Mais c’est aussi pour ça, je pense, qu’on l’oublie peu à peu. Il ne marque pas par ce qu’il dit, mais par la façon dont il le montre. Et cette manière-là, aussi généreuse soit-elle, a du mal à traverser les années. Aujourd’hui, je le relis avec plus de distance. Je vois mieux ses limites, mais je ne peux pas renier le plaisir que j’ai eu à le découvrir à l’époque.

C’est un manga qui se cherche, qui tâtonne, qui se prend parfois les pieds dans ses références trop visibles, mais qui finit par trouver son souffle dans un final intense et très bien mené. Il ne deviendra peut-être pas un classique, mais il reste un beau témoin d’une époque où tout le monde voulait faire "son" grand manga un peu dark. Alors qu'asumer de faire un bon Shonen, c'est déjà pas mal... Et rien que pour ça, je suis content de l’avoir lu.