Les Japonais ont quand même un sacré complexe par rapport à la compétition. Je ne sais pas sic 'est parce que les asiatiques sont censés avoir un petit zizi ou pas, mais dans la plus grande majorité des mangas qui sort, on peut constater que le héros veut toujours être le plus fort dans un domaine. Je pensais échapper à ça avec cette histoire d'alpinisme, mais non, au bout d'un moment il faut introduire un rival, un concurrent contre lequel le héros n'aura de cesse de se mesurer. J'espère que cette thématique sera un peu plus écartée dans les prochains volumes...


Je suis un peu déçu de ce récit. Il aurait été bien d'avoir une histoire minimaliste, un homme face à la montagne. C'est un peu ce qu'on a, mais la narration est alambiquée. C'est l'histoire d'un type qui cherche un appareil photo ayant appartenu à un alpiniste disparu, l'appareil s'est retrouvé entre les mains d'un autre alpiniste, celui-là légendaire, et en le recherchant, le héros va tomber sur des vieilles connaissances qui vont tous raconter ce qu'ils ont vécu avec lui. Une sorte de Citizen Kane sauf qu'il n'y a pas vraiment de surprise quant au personnage.


Cette construction en flashback est vraiment agaçante, on sent que c'est pour donner un fil conducteur au récit qui, s'il avait été construit dans l'ordre, n'aurait été qu'une succession de petites histoires. Et bien moi j'aurais préféré ce système là : les petites histoires c'est bien et puis surtout, le fait de se consacrer à chacune d'entre elle permet de les approfondir, avec peut-être le risque que ça se répète mais de toutes façons on sent déjà la répétition de la manière dont le récit est conçu. Ces retours incessants au présent sont d'autant plus agaçant que ça ne raconte pas grand chose, ça empêche d'approfondir les scènes du passé. Et puis le fameux fil rouge, il est un peu grotesque je trouve : retrouver l'appareil photo pourrait bouleverser toute l'histoire de l'alpinisme Himalayen (rien que ça). Ce goût du spectaculaire dessert véritablement l'histoire (en tous cas pour l'instant, mais j'ai vraiment du mal à imaginer ce qui pourrait provoquer une telle chose, à part peut-être que les photos prouveraient un record inconnu jusque là ou que sais-je, mais est-ce vraiment si bouleversant ?). Et quitte à revenir en arrière, pourquoi faut-il que le héros, comme par hasard, rencontre des gens dans le bon ordre !? Peut-être y aura-t-il des retours en arrière plus déroutants par la suite, mais pour l'instant, c'est trop 'linéaire' si je puis dire).


Autre artifice agaçant : cette voix off omniprésente. Par moment elle est utile pour préciser un sentiment, encore que ça me paraît facile et empêche une réelle intimité avec le personnage mais dans beaucoup d'autres moments elle est inutile car redondante par rapport à ce que l'on voit. Il y en a plusieurs de voix off, celle du narrateur est la plus agaçante car elle en fait trop (c'est un peu trop romantique à mon goût). À nouveau, avec une histoire racontée dans le bon ordre, on aurait pu éviter cela, et les approfondissements de scènes auraient permis de montrer, de faire comprendre ce qui est expliqué brièvement par le biais d'une voix off.


Pour le reste de la narration, je n'ai pas trop à redire : cette conquête des sommets enneigés est fort intéressante, on ressent les conflits, on a à chaque fois un objectif principal qui se répète (atteindre le sommet) mais dont on ne se lasse pas. Vraiment, cette histoire aurait pu être canon si elle avait respecté la chronologie des événements. En lisant ce manga, je me suis dit que ça faisait un peu roman cette manière de raconter, et ce n'est qu'arrivé au milieu du récit que j'ai découvert qu'il s'agissait d'une adaptation.


Graphiquement, il y a de très belles choses. En premier lieu, ce découpage : l'action est lisible la plupart du temps (une ou deux cases au début qui demandent un peu plus de réflexion) et puis surtout les compositions sont magnifiques. J'aime beaucoup l'utilisation des trames (la spécialité des japonais), elles sont ici très utiles pour parfaire la matière de la montagne. Les personnages sont globalement bien dessinés aussi. Seul défaut, tout de même important parce qu'on ne voit que ça : les yeux ! Ils sont trop longs et trop proche,s du coup, à chaque fois que je vois un visage, j'ai l'impression que le dessin est tronqué. Ce qui est curieux, c'est que pour certains plans éloignés, l'auteur place mieux les yeux sur le visage, mais dès qu'il se rapproche on est reparti pour cette sorte de strabisme orbital.


Un autre truc qui me dérange, c'est que les personnages ont tous des têtes impassibles. Avec les mangas c'est tout ou rien : ou bien les personnages sont ultra expressifs, ou bien ils ont encore moins d'expressions faciales que ce bon vieux Randolph Scott. En même temps, cela va de paire avec le ton du récit bien trop sérieux (purée, vu l'ambiance, on se croirait à un enterrement en permanence).


J'aime beaucoup le trait : les pleins et déliés ne sont pas très appuyés et ça fonctionne très bien comme ça. Ce qui marche bine aussi, c'est le rapport entre le personnage et le décor qui est réalisé dans une autre technique. On n'a jamais l'impression qu'ils flottent, fort heureusement.


Bref, je ressors un peu déçu de ce premier tome même si globalement j'ai été assez pris pour ne pas m'ennuyer. Disons que les auteurs auraient gagné à aller au plus simple plutôt que de mener cette enquête un peu débile et s'ils avaient évité de placer ce concours de celui qui a la plus grosse...

Fatpooper
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le 6 mai 2016

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