Je me souviens du lycée ou j'étais choqué d'avoir entendu des "on s'en fou de la Shoah, on parle que de ça, y'en a marre". J'étais choqué de la première partie de la phrase surtout, qui revenait souvent chez mes camarades. Mais moins de la seconde, en France, c'est vrai que l'on parle beaucoup de la Seconde Guerre mondiale quand on parle d'histoire.
Mais que vous soyez d'accord avec ça ou non, vous devez lire Maus.
Parmi les quelques millions de Juifs encore en Pologne ou en Allemagne en 1939, certains ont survécu. Mais il y a un détail auquel on ne pense pas en lisant un livre d'histoire : pour survivre à la Guerre, combien de fois il faut d'abord survivre à la mort ? C'est ce que nous raconte Vladek, un survivant de la Gestapo, de l'Allemagne, d'Auswitch, de Dachau, de tellement de morts, de souffrances tellement inimaginables.
Quelques phrases du dernier chapitre seront plus claires :
"Le plus grand tas de corps était juste derrière la porte. Part où ils essayaient de sortir. Ce type qui travaillait là-bas, il m'a raconté... On séparait les corps avec des crochets. Des grands tas... Les plus forts au-dessus, les plus vieux et les bébés écrasés en dessous... Souvent les crânes défoncés..."
"Et ceux qui finissaient dans les chambres à gaz avant d'être jetés dans ces fosses, c'étaient eux qui avaient de la chance. Les autres, dans les fosses, ils devaient sauter quand ils étaient encore vivants... Les prisonniers qui travaillaient là, sur les vivants et les morts, ils versaient de l'essence."
"Chaque nuit je devais me lever pour aller aux toilettes. C'était toujours plein, tout le corridor, des gens morts, empilés. On pouvait pas passer... Il fallait passer sur leurs têtes, et c'était terrible parce que c'était tellement glissant, la peau, tu pensais toujours que tu allais tomber. Et ça chaque nuit, c'était. Donc j'avais le Typhus, je devais aller aux toilettes et je disais, "maintenant, c'est mon tour. Je vais être par terre comme eux et quelqu'un va me marcher dessus !"
"C'était un train pour le bétail, ils nous ont tassés jusqu'à plus de place... Et le train roulait, roulait, on savait pas pour où... Et puis il s'est arrêté. Des jours et des nuits sans rien. Pas de nourriture, pas d'eau, que des cris à l'intérieur. Les gens commencèrent à mourir, à s'évanouir. Le train est resté sans bouger, je ne sais combien de temps, peut-être une semaine..."
...
Parfois c'était un coup de chance qui le sauvait d'une rafle, parfois une amitié d'une dénonciation, parfois une bonne idée d'une sélection pour le four, parfois une force suffisante des coups de batons... Puis de nouveau. De nouveau un coup de chance. De nouveau un esprit assez vif. De nouveau... Pendant tellement d'années.