Quand un auteur se lance le défi d'atteindre le sommet de la médiocrité, je suppose que ça donne... ça. Qu'est ce "ça"? Un condensé des pires clichés, des pires idées, qu'il m'ait été donné de contempler dans l'univers du manga. Et de la fiction en général.


Pourtant, l'auteur s'accroche à son histoire. 400 chapitres au moment où j'écris, la suite est en préparation. Je les ai tous lus, à grands grincements de dents et sursauts d'horreur. Je suis revenue de cette épreuve en personne différente de qui j'étais avant, comme un soldat revient du front. Louez donc mon courage et mon sacrifice.

J'aurais dû deviner dès le début que la bataille serait rude. Je trouvais le scénario douteux: dans un univers où la population se voit dotée de pouvoirs surpuissants, les alters, un garçon né sans alter rêve de rejoindre l'académie des supers-héros, malgré les moqueries subies. Évidemment, toute la mise en scène est faite pour que le lecteur compatisse à sa misérable situation: martyrisé par des brutes qui le rabaissent en boucle, une attitude de pauvre victime, une apparence plutôt frêle.


Les premières pages lues, j'étais déjà bouche-bée devant la plus totale absence d'originalité des personnages. Le héros, Izuku, du style déterminé, qui ne se laisse pas abattre (à raison, puisque les évènements lui donneront toujours ce qu'il veut). Le rival, Bakugo, dont les interventions se limitent à dégueuler sa haine et son arrogance. Ochako, car il faut bien un ship pour le personnage principal: gentille comme on lui demande de l'être, présente quand il faut mettre Izuku en valeur. All Might, le mentor, pour lequel j'ai perdu tout espoir dès que je l'ai vu arriver en grandes pompes, avec une narration cherchant à me faire ingurgiter qu'il fÂbuleux et incroyÂble et fantÂstique et sensÂtionnel et- . L'inévitable pervers Mineta (dont le "gag" a atteint un niveau de malaise inégalé vis-à-vis de son apparence jeune). Et j'en passe, car l'univers se voulait riche. Sauf qu'aucun n'est unique: ils ne sont que le concentré des clichés vus et revus des shonens.


Les physiques sont, sans autre mot, laids. Bien sûr, c'est subjectif, comme l'est l'entièreté de cette critique: mais je trouve les traits absurdes, le fanservice est présent, tout est mal proportionné. Pour la défense de l'auteur, je n'ai pas grandi au milieu des comics et des BD de super-héros auxquels il fait allusion, je n'ai donc jamais été sensible aux chara-designs costumés. Mais même si ç'avait été le cas, je doute fort que j'en aurais eu une meilleure opinion.

Je donne, sans ironie, une mention spéciale à Tsuyu Asui: la seule dont j'ai aimé l'apparence, et que je trouve sincèrement drôle à regarder, de par sa tête.


Dans des résumés lus au préalable, j'avais vu le mot "vilain" employé pour désigner ceux contre qui les héros se battent. J'avais pris ça pour une façon de désigner la basique répartition manichéenne du shonen: le héros pétri de convictions et le méchant désillusionné qui est son ennemi naturel. En fait, non. Les ennemis se désignent eux-mêmes par le nom de vilains (et en sont d'ailleurs très fiers). Le titre est officiel au sein de cet univers. Le groupe des ennemis principaux se prénomme... l'Alliance des Supers-Vilains. J'en aurais pleuré si je n'étais pas tellement occupée à rire.

Je suppose que dans ce monde, surgissent des nulle part les vilains, ces entités grotesques qui ont pour seul but de semer le chaos. Ils naissent en ricanant au milieu d'une foule terrorisée, agissent de façon moralement condamnable pour qu'on comprenne bien quel est leur rôle, et attendent l'arrivée du vaillant héros prêt à la lutte pour protéger les citoyens innocents. Le gentil gagne, au suivant.

Rarement, ils auront un objectif concret derrière leurs actions. Encore plus rarement, ils auront une histoire. Et même dans ce cas, ça ne veut pas dire qu'ils en deviendront intéressants: il ne suffit pas d'un flash-back tragique pour faire un antagoniste réussi. Même le vilain récurrent, Shigaraki, n'aura pas de traitement de faveur.

Pourtant, avec le recul, je me dis qu'il y aurait eu un potentiel, au moins sur ce point: dans une société qui glorifie l'héroïsme et où le don de soi est la valeur la plus estimée, que devient un individu égoïste, qui n'est pas prêt à offrir sa vie pour son prochain? Un individu... normal, en somme? Le méchant légitime de ce monde n'était-il pas l'humain le plus simple qui soit?


L'autre nom de ce manga, c'est l'excès. Et l'absence de sincérité. Et vas-y que ça chouine, que ça braille, que ça met de fausses larmes en espérant extirper quelque chose du lecteur. Les gros plans qui dégoulinent de morves, y en a un paquet - mais pas un seul qui ne me touche véritablement au cœur. J'en cite Izuku qui pleure en apprenant, enfant, qu'il ne pourra pas devenir un héros, qui pleure car il se fait harceler par Bakugo, qui pleure quand il se fait agresser par un vilain surgi pour provoquer artificiellement sa rencontre avec All Might...

Évidemment, individuellement, les pleurs dans ces situations se justifient: ma morale n'est pas qu'il faut tout endurer sans moufter. Mais tout nous est balancé d'un coup, afin de nous faire compatir à ce pauvre petit garçon, et nous ravir quand, enfin!, il deviendra un brave héros, qui aura bravi maints obstacles, et qu'on regardera avec émotion le chemin parcouru depuis le début. Mais cela n'aura fait que me dégoûter de son aventure.


Horikoshi a réussi un exploit: celui de m'ennuyer face à des duels endiablés. Les coups pleuvent à foison, gros plan sur la foule ébahie, ça hurle de grandes déclarations et ça s'affronte jusqu'à s'effondrer au milieu des explosions... et moi, je tourne la page, en me demandant quand j'en verrais le bout. Plusieurs raisons à ça.

Premièrement, l'absence de pirouettes scénaristiques: l'histoire n'est qu'un tapis rouge sur lequel les héros avancent en direction du dernier chapitre. Les personnages principaux auront toujours la victoire. La seule exception aura été l'absence d'Izuku sur le podium dans le Championnat Sportif de Yuei.

Deuxièmement, les alters sont... fades, sans autre mot. Variés, je le reconnais: des hybrides, des dons de contrôle des éléments, une fille invisible, l'étrange pouvoir de manipuler celui qui répond à nos questions... mais jamais ils ne seront mis en valeur autrement que par une éclatante victoire. On différencie les alters qui gagnent et les alters qui perdent. Il aurait fallu s'inspirer des bonnes heures de Naruto, quand un pouvoir héréditaire pouvait marquer l'esprit sans gagner, tel Shikamaru qui perd face à Temari mais dont les capacités sont celles que l'on retiendra.

Troisièmement, les combats n'ont... pas la moindre esthétique. Aucun sens du grandiose, aucune chorégraphie, les plans se contentent de placidement s'enchaîner de la façon la plus soporifique qui soit. Ce qui est de la stratégie, parfois, il faut un temps de compréhension aux héros, pour saisir le fonctionnement de l'alter ennemi et trouver un moyen de le contrer. Mais très rapidement, on en reviendra à ce qui fait la base même du manga: des personnes qui s'agitent et de grands bruits en arrière-plan.


Des fois, je me demande ce que j'ai manqué dans MHA. Je vois d'immenses chiffres de vente, des figurines, une adaptation animée. Alors je relis quelques pages, je me remets en question, et... j'en retombe à la même conclusion: le manga est, à mes yeux, déplorable.

Je conclus sur ce conseil: n'essayez pas l'aventure. Je l'ai franchie pour vous, au prix de ma santé mentale. Faites en sorte que mon sacrifice ne soit pas vain. En tant qu'êtres humains, vous méritez mieux que ça. Il existe des séries qui ne vous donnerons pas un TSPT.

Alioth6
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le 10 janv. 2024

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