l'enfer des mongoles
Shut Hell est un manga qui se passe pendant l'ère de Gengis Khan et sa domination sur les Xia occidentaux. Récit qui nous raconte l'ascension d'une jeune femme prénommé Shut elle une sauvage en quête...
le 27 août 2025
Pour myope que je suis, j’ai l’œil ; et le bon. La faune interlope des Internets profonds aura beau, même en caps lock, m’agonir de tout ce qui lui vient comme injure, je persiste ; y’a des variables irréductibles qui font qu’un homme soit un homme et une femme soit une femme. Cela, je ne l’écris pas relativement à la thématique du présent manga où, le protagoniste – nous y reviendrons – change de sexe comme d’époque. La remarque liminaire qui me sera venue soudain, elle serait davantage imputable au dessin.
Y’a un quelque chose, peut-être même un rien, qui, quand le crayon s’égare sur le papier, signe notre identité avant même qu’on ne paraphe. Un dessin de manga, je peux, avec une acuité rare, vous dire s’il est parti d’une pogne de mâle ou d’une fine et délicate mimine de demoiselle. Tout ça, nonobstant le fond de l’œuvre qui, le plus souvent, trahit encore mieux le sexe de qui est au bout du pinceau.
Sans qu’elle n’eut à forcer sur la mine, je savais à quel point celle-ci fut femelle. Et pourtant, la guerre et le sang – plutôt initialement bien rapportés dans le cas qui nous concerne – y est au centre de la trame. Cela avait par ailleurs été le cas lorsque, jadis, Itoh Yu prêta ses esquisses afin qu’elle adapta génialement le fameux Imperial Guards. J’avais alors été émoustillé de ce que j’ai découvert ; une hirondelle n’aura cependant pas fait le printemps.
Rien ou presque ne me plaît dans ce que délivre Shut Hell. Dès lors où elle se sera faite la scénariste de ses copies, dame Yu aura perdu tout son charme. D’autant que le premier chapitre est bien assez confus pour nous dissuader de poursuivre la lecture.
Un étudiant japonais est suivi chez lui par une nouvelle élève ténébreuse, celle-ci, à son domicile, joue d’un instrument ancien, et voilà qu’ils se trouvent portés en Asie mineure à l’époque des joyeuses frasques Genghis Khaniennes, changeant l’un et l’autre de sexe parce queeeeeee… parce que !
Tout va trop vite. Le personnage principal accepte son sort sans broncher, si bien qu’on ne comprend finalement pas tellement quel était l’intérêt de nous le présenter comme un de nos contemporains. Un récit historique, sans variable fantastique, aurait été tout aussi valable sinon plus acceptable encore.
Les événements s’enchaînent trop prestement, rien ne nous est présenté. L’intérêt d’une pareille mise en abîme, par principe, consiste à nous donner l’occasion de découvrir le monde à travers les yeux du protagoniste qui, lui aussi, y est étranger. Mais non, le voilà déjà embarqué dans l’aventure comme si la bagatelle était un lundi matin pareil à tout autre.
À cette brave dame, on ne lui fera pas le reproche de ne pas savoir rapporter la guerre sur papier ; elle a comme qui dirait fait ses preuves avec Imperial Guards. Les batailles, au moins graphiquement, sont judicieusement accouchées sur les planches ; le fait qu’on ne s’intéresse cependant pas au contexte environnant gâte sérieusement la fête. L’enjeu, parce qu’il nous échappe très franchement, anéantit les efforts entrepris pour en renforcer les aspects.
En un sens, Shut Hell est une course à pied engagée par un athlète, une course qui, si elle finit par cheminer bon train, a toutefois débuté son parcours sur une chute venue compromettre l’intérêt même de courir après que la défaite soit assurée. Shut Hell a été si abominablement mal présenté qu’il en a pourri ce qui suivit.
Et à quoi bon les allers et retours temporels ? À nous agonir d’une histoire d’amour croisée entre deux mêmes personnages dispensés dans deux incarnations. La belle affaire, qu’est-ce qu’on se fout.
La brutalité originelle de ce qui constitua la trame s’adoucit en trois tomes de temps pour laisser derrière elle une traînée légère et insipide. L’amorce cherchait à nous capter par un vulgaire trompe-l’œil. J’espérais, outre ces amourettes stupides, un manga crédible traitant des conquêtes mongoles, j’eus à la place un manga mongol suivant la quête de deux cons. Shut Hell – le personnage – est une Mary Sue qui n’a sa place ni dans ce récit, ni dans aucun autre d’ailleurs. On aurait voulu espérer des personnages solidement imbriqués dans leur temps, un semblant de réalisme un brin magnifié par la nécessité romanesque ; nous n’aurons à la place que des gesticulations ridicules venues sérieusement entamer la réputation de son auteur.
C’est là qu’on voit à quel point certains mangakas ne sont guère que des prête-plume ; des Rônins engagés à l’envolée par un écrivain pour faire aboutir ses plans. Car dès lors où le sabre cherche à se faire la tête pensante, le résultat s’avère désastreux. Les personnages sont faits d’archétypes, grossiers et mal écrits, ils ne nous donnent jamais envie de voyager à leur côté. Je l’écris aussi sincèrement que je le déplore, j’avais honnêtement l’intention de lire un résidu de Shônen au regard de l’exhibition des protagonistes.
Les batailles virent très rapidement à la caricature, la stratégie s’effaçant derrière les seules frénésies armées des protagonistes les mieux en vue. La bataille, de là, n’est plus qu’une scène lointaine, une tapisserie trouvée là, derrière deux personnages importants pour qu’ils se confrontent à raison de passes d’armes improbables et lassantes. Disons que Shut Hell est aux batailles rangées ce que Dynasty Warriors est aux véritables guerres des Trois Royaumes ; vous jugerez alors de tout le sérieux de l’affaire.
Pour finir, le couillon et la couillonne se tombent dans les bras ,la chose, comme d’habitude, était entendue depuis le départ, un monologue narratif expédié pour nous ânonner quelques platitudes en mimant mal le lyrisme en fond, et il ne reste plus qu’à tirer la chasse.
Pire que mauvais, c’était décevant. La faute m’incombe tout particulièrement en premier lieu pour en avoir espéré autre chose. Je sais à présent qu’Itoh Yu n’est qu’un outil au service d’une bonne écriture et, qu’à défaut de cette dernière, elle n’est guère qu’un pinceau maculant inconséquemment les toiles qui lui viennent à portée.
Créée
le 28 juin 2025
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