Silent Jenny c'est 5 ans d'attente pour une centaine de page de plus et donc 10 euros de plus également pour dire la même chose que précédemment mais deux fois moins bien, à savoir que la vie humaine est quand même une belle saloperie ( avec le sourire je vous pris ). Mais c'est aussi 100 pages de chouettes dessins en plus et un travail de la couleur absolument somptueux, tout simplement.
En creusant un peu on y trouve un univers foisonnant qui fait beaucoup de promesses jamais tenues, de chouettes concepts ( l'infra-monde, les monades, les manges-cailloux ) mais qui ne vont jamais au bout, gangrénés par une foule de dialogues d'expositions et une histoire aux enjeux absents. Histoire qui semble se cacher intégralement derrière des métaphores philosophiques éculées et un discours nihiliste inquiétant. C'est un univers qui a la prétention de se vouloir crédible jusque dans ses bizarreries mais qui s'autorise le luxe de ne pas répondre à une certaine rigueur qu'il s'impose pourtant lui même quand ça l'arrange. C'est enfin beaucoup plus de personnages récurrents qu'autrefois mais pour moitié moins de profondeur et d'attachement, et un demi personnage principal qui n'est là que 50% du temps, mais tant mieux car nous n'en retiendrons qu'une demi-déception. Dommage pour Jenny car il s'agit à l'instar d'un Silicium dans Carbone et Silicium d'un des seuls personnages écrit par l'auteur qui soit au départ un personnage ACTIF, qui se sort les doigts pendant que ses seuls amis lui reproche de ne pas être une paillasse amorphe de compagnie, mais l'auteur décide de la punir pour ça, soit.
Bref.
Impossible de ne pas voir les qualités d'un point vue graphique, et de certaines parties du découpage, de la vision de l'auteur pour ce monde... mais difficile également de fermer les yeux sur un défilée de promesses non tenues et de " demi-parti pris ", tant scénaristique que politique dans son livre pourtant un tier plus long que les précédents. D'aucun pourrait trouver ça " facile " ou " convenu ". La BD rate toute ses occasions de montrer la noirceur et le désespoir, le vrai, mais aussi la lumière qu'inspire ce monde. Elle ne décolle jamais et ne va jamais à fond nul part et peine à toucher, choquer, ou bousculer, comme si un voile gris uniforme la recouvrait dans son entièreté, plat et dénué de nuances et de la moindre étincelle d'émerveillement.
Déception. J'aurais souhaité qu'il en soit autrement.