Dans l’ensemble de son travail, l’auteur de BD et réalisateur de film Riad Sattouf a toujours eut une démarche très personnelle. Son film Les beaux gosses, ou sa série les Pauvres aventures de Jérémie pour ne citer qu’eux sont des œuvres en grande parties autobiographiques, développant ses thèmes de prédilection, l’enfance et l’adolescence. Ce n’est donc pas étonnant que son dernier ouvrage paru en mai dernier, L’Arabe du futur, parle des six premières années de sa vie, passée en Libye et en Syrie.


Scénario : Riad va donc, dès ses deux ans, quitter sa France natale pour vivre en Libye puis en Syrie, accompagné de son père voulant abandonner son mode de vie occidental et de sa mère. A travers ses nombreux souvenirs, il décrit avec une certaine naïveté les aspects du monde dans lequel il a vécu, en évoquant le régime politique de Kadhafi et celui d’Hafez Al-Assad, et la vie quotidienne de sa famille. L’auteur dresse par ailleurs un portrait effarant et osé de son père, un universitaire se convertissant tant bien que mal à la pauvreté du Moyen-Orient, et dont le comportement est souvent pittoresque et contradictoire. Enfin, il développe parfois un point de vue encore plus personnel en décrivant ses angoisses, ses goûts et son état d’esprit d’enfant.


Dessin : On a droit ici au style habituel de Riad Sattouf, comprenant un encrage épais et épuré, avec des visages très marqués et expressifs, ainsi que des décors simple mais efficace. Le tout est mis en valeur par une mise en couleur monochrome plutôt agréable, avec une couleur pour chaque pays : bleu pour la France, jaune pour la Libye et rouge clair pour la Syrie.


Pour : La précision et la franchise des souvenirs de l’auteur est proprement ahurissante. Il fait preuve d’une mémoire visuelle remarquable, avec la reconstitution de visages et de lieux qu’il n’a pas revu depuis son enfance. Le résultat captive donc d’autant plus le lecteur…


Contre : … Mais lui fait du coup se poser certaines questions sur l’entière authenticité des événements. Les détails distillés dans l’album sont tellement nombreux qu’on en vient à se demander si l’auteur n’a pas un peu réinterpréter certains passages, et si oui lesquels ? Des éléments de réponses sont donnés dans son interview pour CASEMATE numéro 71, daté de juin 2014.


Pour conclure : Avec L’arabe du futur, Riad Sattouf ne se repose pas sur ses lauriers, et c’est tout son honneur. Le point de vue clairement péjoratif qu’il donne sur le monde arabe en fera tiquer plus d’un, à commencer par son père si ce dernier est toujours en vie. Mais le plus réjouissant, c’est que cet album est le premier d’une série qui comptera au moins trois épisodes. Et vu la fin de ce premier segment, on s’attend au pire pour la suite des désastreuses aventures de la famille Sattouf…


Ma critique du tome 2 :
http://www.senscritique.com/bd/Une_jeunesse_au_Moyen_Orient_1984_1985_L_Arabe_du_futur_tome/critique/45999671

Marius_Jouanny
7
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Les meilleures BD de 2014 et Journal d'un bédéphile : année 2015

Créée

le 16 sept. 2014

Critique lue 333 fois

2 j'aime

1 commentaire

Marius Jouanny

Écrit par

Critique lue 333 fois

2
1

D'autres avis sur Une jeunesse au Moyen-Orient (1978-1984) – L’Arabe du futur, tome 1

Du même critique

L'Impasse
Marius_Jouanny
9

Le dernier des Moricains

Il faut le dire, ce jour-là, je n'étais pas au meilleur de ma forme. Allez savoir pourquoi. Mais dès les premières secondes du film, j'en ai vu un qui portait toute la fatigue et l'accablement du...

le 4 août 2015

46 j'aime

12

All Things Must Pass
Marius_Jouanny
9

La sublime diarrhée de George Harrison

1970. Un an après Abbey Road, George Harrison sort ni plus ni moins qu’un triple album de presque deux heures. Un ouragan d’inventivité et de registres musicaux, en grande partie l’aboutissement...

le 22 avr. 2016

43 j'aime

6

Les Proies
Marius_Jouanny
6

Sofia's touch

Difficile de dissocier "Les Proies" de Sofia Coppola du film éponyme dont il est le remake, réalisé par Don Siegel en 1971. Au-delà de constater la supériorité de l'original, ce qui est assez...

le 28 août 2017

37 j'aime

4