Le crime a lieu en 2018. Dans la salle Pleyel. Le 2 mars. En ce jour triste et sombre de notre histoire, la prestigieuse et néanmoins dépassé Académie des arts et techniques du cinéma remettait, dans le cadre d'une désastreuse et hypocrite cérémonie le césar du meilleur film à *120 battements par minutes* de Robin Campillo. Outre le caractère engagé du film, la bande d'élitistes adeptes du retournement de veste qui composent cette assemblée a décidée de récompenser un classicisme navrant là où d'autres concurrents au titre ont mieux à proposer.
Les qualités techniques du film ne sont pas à remettre en cause, c'est sa démarche militante qui démontre à elle seule que les vieux qui récompensent ces films ne cherchent pas à sortir le cinéma français de la sclérose du social à tout prix. Cette démarche me débecte, féliciter un travail car il n'est que le résultat d'un climat social, en un mot : fourbe. A la poésie et l'audace visuelle d'un *Au revoir là-haut*, les retraités aigris ont préférés nous rabâcher les esgourdes avec un tire-larmes grossier, facile et assez insultant dans sa manière de nous imposer sa sacrosainte morale.
La presse spécialisée parle de triomphe, de film nécessaire, il m'est donc nécessaire d'aller contre mes confrères et de démontrer que ce film creux, qui fait tant parler, me désole. Oui, la cause et noble mais ça, tout le monde le sait. Ce qui est moins noble c'est d'essayer de ne parler qu'aux militants, de délaisser honteusement le reste du public. De prêcher les convertis en somme. Tout sonne faux, forcés et désespérément larmoyant. La narration est sommaire à tel point que l'objectif semble de solliciter le moins possible les neurones atrophiés des festivaliers écrasés par la chaleur du sud... Le pessimisme ingrat et la victimisation volontaire et putassière achèvent de parfaire cet hideux tableau.
Quel désastre ! Glorifier l'ordinaire, le pathétique appuyé plutôt que les prises de risques véritable. La France ne mérite-t-elle pas mieux ? Oui, le cinéma mérite mieux que ces films sortant tous du même moule du bien-pensant allergique à l'enfer de la province. Oui, le cinéma mérite que l'on mette sous les projecteurs autre chose qu'un ramassis de bons sentiments gerbant de manichéisme. Sortons les violons, le cinéma français, déjà mal en point, est mort, des coups assénés par le banal, le disgracieux, le lisse, l'attendu et ankylosé cinéma, non pas social, mais antisocial. Celui là même qui, plutôt que de rapprocher les gens, les confortes dans leurs stéréotypes crasseux, cruels et stupides. Bravo, monsieur Campillo, vous n'en étiez pas à votre coup d'essai mais vous l'avez enfin tué par votre démarche sincère. Sincère ? Oui, sincèrement amoral, votre film capitalisant sur l'appui de la mascarade qu'a été cette 43ème cérémonie des César. Et vous, les spécialistes séniles et frileux de mettre en avant la moindre audace, vous devriez vous couvrir de honte plutôt que de savourer vos toasts et votre champagne.