En 2016, les films de requins, personne n’y croit vraiment. Y a bien une bande annonce de temps en temps qui semble sortir du lot et prendre le sujet avec un minimum de compétence, mais ça reste un émoi très éphémère. Mais en 2016, le raz de marée des squales super créatifs, ceux qui volent dans des tornades ou sont affublés de tentacules est aussi un peu passé et c’est pour certain une accalmie providentielle pour percer. In the Deep est à l’image de ses poissons, personne ne l’a vu venir, nageant sous une surface intégralement recouverte de super héros, et c’est avec un enthousiasme et un savoir faire surprenant qu’il jaillit d’un coup de manière relativement plaisante.


C’est du survival en milieu hostile. Un peu comme vous en avez déjà vu beaucoup, peut être même un peu trop. C’est le style huis clos très restreint, à mi chemin entre Buried et Open Water, deux filles sont calfeutrées dans une cage à requin tombée à 47 mètres de profondeur et dressent leur yeux perdus vers une tenture bleue cachant quelques poissons qui pointent pour l’heure du déjeuner. Si j’voulais convaincre même les plus septiques de tenter le machin, je dirais que c’est Gravity avec des requins.


Alors z’êtes des malins, on n’vous la fait pas, la scène se passe à près de 50 mètres de profondeur et les deux femmes ont autant de visibilité là dessous que la tête la première dans une soue à sangliers, vous vous en doutez, le truc va évidemment jouer sur les jumpscares à gogo. Et c’est le cas, les squales surgissent des multiples murailles bleues comme des torpilles et tentent sans relâche de faire sursauter le bouffeur de pop-corn. Et pourtant... C’est certes pas que ça brille d’une originalité folle, c’est même pas que ça fonctionne de manière idéale, mais il faut bien dire que le milieu seul, d’une immensité confinée, suffit à offrir de la nouveauté dans le monde cinématographique du sursaut, pour peu qu’on note que l’ensemble est fait avec soin, nimbé d’une photographie léchée et d’un rythme étouffant. Rien d’extraordinaire c’est certain, rien d’orgasmique non plus, pas de chef d’oeuvre, pas d’apogée de l’année filmique, juste l’art de traiter son idée avec tous les moyens dont on dispose et d’essayer de le partager. Pas d’excès, pas trop de gras, un terrain qui semble prêt à accueillir n’importe quoi à l’exception de l’être humain, une tension tangible, le bleu des fonds répondant à l’orangé mourant des lampes comme la faible consolation impuissante sous un plafond de plusieurs milliers de tonnes. Si on ajoute à tout ça la belle démarche de ne pas mettre trop de requins non plus, d’espacer au possible leurs attaques pour modeler une présence fantomatique infiniment plus efficace et si cette parcimonie laisse parfois la place à l'exploration d'un décor lunaire par une proie anxieuse et presque aveugle (la scène de la fosse est exceptionnelle) alors on tient là un film de requin réussi. Eh bah oui.


Alors le scrutateur avisé va les chercher, les incohérences ou, éventuellement, les actes irréfléchis et il y en a, comme dans tout bon survival qui se respecte, à commencer par l’inconscience suicidaire de monter dans cette cage rouillée et sans flotteurs (dans Jaws en 75, Matt Hooper mettait déjà des flotteurs à sa cage alors en 2016 faut être sceptique si on vous propose une descente). Y a aussi des requins qui obéissent à des besoins de mise en scène, disparaissant lorsque des personnages blessés surnagent dans le nuage de leur propre sang, chose qui a pourtant pour un requin le même effet qu’une pelote de laine pour un chaton. Le zoologiste sourira aussi devant ce poisson dément qui charge comme un bouledogue enragé et brise des rochers. Mais sincèrement, on s’en tape pas mal hein ? Des films comme ça, tout aussi insupportables que soient leurs personnages principaux, c’est bien trop rare pour être boudé. Je l’répète c’est pas un chef d’oeuvre, j'en rajoute, j'exagère mon enthousiasme, je minimise mes exigences mais on s'connait maintenant, c’est juste qu'ici, c'est fait jusqu’au bout par un type qui tient son idée et essaie de la mettre en images au mieux avec amour et bonne volonté. Moi ça m’suffit.


(merci KillTheCreex de m'avoir recommandé ce film sans attendre de l'avoir vu, t'as eu la main heureuse !)

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le 5 août 2016

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zombiraptor

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