Après une décennie presque entièrement consacré aux Tranformers , Michael Bay revient au bon gros film d'action bas du front avec port du cerveau non obligatoire pour le compte de Netflix. Ce premier film qui pourrait bien se décliner à travers de nombreuses suite (Bah oui ma brave dame y-a tellement de méchants à corriger dans le monde) est l'un des plus gros budget de la fameuse plate forme de streaming.
6 underground ne raconte finalement pas grand chose puisque le pitch du film tient lieu de scénario. Nous avons donc une bande de joyeux mercenaires toujours prompt à la vanne potache (on est cool ou on l'est pas bordel !) qui décide que le monde serait tellement plus meilleur si on tuait tous les vilains méchants pas beaux de la terre. Du coup ils entreprennent de tuer un dictateur pour le remplacer par son gentil frère démocrate et changer la face du monde. C'est si simple la géopolitique version blockbuster ...
Avant de parler de la forme il convient donc de se pencher un peu sur le fond à condition toutefois de ne pas avoir trop peur du vide. Sans doute conscient que son histoire tient toute entière au dos d'un post-it, Michael Bay déchire le bout de papier et recolle les morceaux dans tous les sens pour faire style; le film nous la joue donc flash-backs déstructurés histoire de masquer à minima la vacuité de l'ensemble. J'ai même lu quelques critiques qui disait que le film était complexe à suivre alors que non, l'histoire est simplissime mais elle s'affranchit artificiellement de la linéarité pour se la péter. Si 6 Underground n'était qu'un film d'action bourrin totalement con et qui s’assume joyeusement dans sa débilité il serait presque sympathique mais attention le film a des choses à dire et ça dénonce grave. L'analyse et le discours politique de 6 Underground est aussi profond qu'un discours de miss France ou que l'analyse d'un gamin de cours préparatoire. Si on remplaçait les méchants par des gentils le monde ne serait-il pas plus beau et plus joli ??? C'est pas con ,si de courageux mercenaires avaient remplacé Hitler par Casimir c'est certain que la seconde guerre mondiale aurait sans doute été plus festive ?? . Le plus con dans tout ça c'est que si le film jongle très souvent avec une forme d'ironie et de second degrés il devient lourdement pesant dans sa morale de bisounours sur la famille, le bien et le mal, les gentils et les méchants... D'un cynisme putassier le film nous sort quelques séquences pseudo-lacrymale d'une bêtise crasse comme lorsque ce brave et bon Ryan Reynolds sauve un gamin d'une attaque chimique avant de repartir au ralenti dans le soleil couchant d'une ville en ruine en portant une petite fille dans les bras sur quelques notes de piano, y-a pas à dire c'est triste ses centaine de figurants morts mais putain qu'est ce que c'est beau un héros qui marche au ralenti... J'en aurai chialer comme un gosse. Ah si le monde était à l'image d'un film de Michael Bay tout serait si magnifique. On aurait trois couchers de soleil par jour tant c'est beau, on aurait des voitures vertes pomme fluo indestructibles pour se faire remarquer, on aurait la sensation de jouer dans des publicités pour du café, des bagnoles et des montres de luxe dix fois par jour, on marcherait au ralenti parce que c'est franchement trop cool, les meufs trop bonnes marcheraient toujours très lentement en contre plongée pour qu'on admire leur boule, y'aurait des néons bleus et des couleurs saturées partout tout le temps, on vivrait dans le temple du bon goût.... C'est si beau ce mélange de beaufitude assumé, de bling bling de mauvais goût, d’esthétisme de publicité et d'angélisme moral. Oh putain ! les plans sur la Lamborghini, on est quand même à deux doigts de la pub pour la Laguna dans La cité de la peur. Regarder 6 underground c'est aussi intense émotionnellement que de se retrouver dans la 205 tunning tout en néons de tonton Robert qui fait des dérapages sur le parking du Macumba pour épater la minette qu'il a ramassé en boîte de nuit pendant que l'auto radio cracherait une version techno de Michel Fugain qui chante " Qui c'est qui est très gentil ? Les gentils - Qui c'est qui est très méchant ? Les méchants " .... C'est un peu ça Michael Bay , ce subtil mélange de profondeur et de superficialité
Après je dois avouer que je n'ai jamais été un grand fan du style de Michael Bay et que fatalement je n'attendais pas moult merveilles de 6 underground. Sans surprise on retrouve cette esthétique tape à l’œil de pub, ce découpage et ce montage ultra cut qui confond souvent agitation et action et cette caméra qui semble incapable de se fixer le temps d'un plan de plus de sept secondes.... Après je reconnais parfaitement la générosité de Michael Bay à vouloir livrer des séquences d'actions complètement folles et décomplexées pour emporter le spectateur comme dans un grand huit de fête foraine mais j'ai personnellement besoin d'un peu plus de lisibilité. J'ai surtout la sensation parfois que ça va vite, que ça pète dans tous les sens, que c'est bourré jusqu'à l'overdose d'effets numériques mais qu'au final c'est tout de même zéro implication émotionnel ; beaucoup de bruit pour rien en somme !! . Alors oui y-a des cascades de dingo, des punchlines trop cool (David il a un petit zizi mouarf !!), des mecs qui citent des films n'importe comment juste pour le fun, un yamakazi sous amphétamine, des jolies gonzesses, des gros flingues, des belles voitures.... Mais au final tu nous raconte quoi Michael ? Est ce que toute cette agitation clinquante n'est pas tout bêtement le signe que justement tu n'as strictement rien à dire ? Dans cette volonté d'aller vite au mépris parfois de toute logique il faudra m'expliquer par quel tour de passe passe scénaristique les six héros mercenaires du film se retrouvent en 4 secondes chrono dans l'hélicoptère à la fin du film, à ce niveau là ce n'est même plus une ellipse narrative c'est "me faites pas chier avec la cohérence de mon récit j'ai trop besoin de mes 6 gentils héros dans l'hélico pour l'effet de surprise et je vous emmerde" .
Si 6 Underground n'était qu'un divertissement qui assumait fièrement sa connerie j'aurai sans doute réévaluer la note à la hausse. Ce mélange étrange de cynisme, de candeur manichéenne, de n'importe quoi permanent et de blin-bling putassier rend finalement l'ensemble assez indigeste. .