Le méchant vizir Javel

Pas d'intro pour celui-là, à la base ça ne devait être qu'un commentaire sous ma note mais le nombre de points à soulever est devenu trop important pour ça. De toute façon qui a besoin d'une mise en contexte pour ce remake d'Aladdin ?

C'est terrible, chaque scène souffre de la comparaison avec le dessin animé. CHAQUE scène, et souvent pour des détails tout cons comme l'hypnose qui se fait au cours d'un plan large laissant toute la place au décors et à Jafar, au lieu de se resserrer sur un sceptre qui occuperait tout le champ de manière plus étouffante comme dans le dessin animé. Systématiquement on se dit "mais pourquoi ils ont fait ce choix qui casse tout ?", en sortant de la salle on en a discuté pendant des heures. La scène du triomphe de Jafar, mais quelle mollesse ! On dirait que le film essaie de nous exposer tous les défauts scénaristiques que l'original avait su camoufler, par exemple Jasmine vole la lampe à Jafar mais ne pense pas à la frotter cette andouille. Ou le premier vœu de Jafar qui prend un effet totalement ridicule qui donne l'impression qu'il a gâché son joker (devenir sultan, ça veut dire chopper ses vêtements tandis que les gardes continuent de se souvenir vers qui va leur fidélité : gros fail). Tous les moments dramatiques en pâtissent, c'est un vrai cas d'école pour montrer aux étudiants en cinéma la bonne et la mauvaise façon de filmer une scène.

En plus le film a le cul entre deux chaises au niveau du cartoon : il essaie de le limiter au max, ce qui est sans doute une bonne idée pour du live malgré les sacrifices déchirants que cela implique (Iago, le tigre et le sultan y perdent énormément en intérêt). Mais ce n'est pas complètement abandonné pour autant, ce qui fait que les sacrifices cités plus haut sont inutiles et servent juste à limiter notre plaisir. Les numéros musicaux aussi perdent en dynamisme, celle qui introduit Aladdin notamment est écartelée entre les paroles qui appellent à un enchaînement furieux de gags type Tex Avery et le traitement qui anesthésie tout ça, comme pour nous rappeler qu'on n'est pas dans un dessin animé et que tout est donc moins drôle.

Cependant il y a un bon truc c'est le Génie. Pas qu'il soit meilleur que l'original, loin de là. Juste que ses dialogues sont à la fois différents et rigolo, ce qui évite la comparaison trop fâcheuse que se tape tout le reste du film (y compris Jafar qui est devenu le fadasse ultime). Il a son propre style qui reste dans le ton du Génie que l'on connaît, c'est moins bien qu'avant mais on pouvait difficilement espérer plus et c'est ce qui fonctionne le mieux dans ce remake. Je dirais aussi que j'aime bien certaines idées de numéros musicaux même si ce n'est pas totalement concrétisé. Par exemple le numéro à la Broadway est sympa et j'étais content de trouver une touche de Bollywood, mais il aurait fallu aller plus loin pour l'assumer davantage. Faites péter les 10 000 figurants, faites durer le truc, balancer de la chanson vraiment Bollywood, lâchez vous bon sang ! Là on a une petite danse sympa au milieu et une scène pré-générique cool avec une zik un peu hors-propos, on peut encore améliorer ça. Quitte à faire claquer les gros costumes et les ralentis foireux, autant y aller à fond dans l'opulence, la démesure et le style Bollywood, il y avait l'opportunité d'apporter cette fraîcheur là dans ce cinéma tout en se démarquant de l'original. Là on se farcit la caverne aux Merveilles du pauvre et un palais mal mis en valeur, pour une super production pareille c'est triste.

Néanmoins je ne peux me résoudre à mettre une note plus basse. Car même si je regrette que ce film ne soit pas à la hauteur de ce que le genre aurait du offrir, je ne peux prétendre ne pas mettre un peu amusé devant, souvent à son détriment d'ailleurs. Will Smith faisait bien le boulot et aura su me faire sourire, les costumes sont chouettes et j'aime le tourisme dans un décors trop rarement exploité par Hollywood (et trop rarement exporté chez nous depuis l'Inde). C'est mon petit péché mignon, et on s'est marré à citer tous les mauvais choix scénaristiques.