Ce film m'a beaucoup plu malgré quelques petites longueurs.


Je trouve que c'est un film très violent. Une violence symbolique avant tout. La violence que la société marchande exerce sur ses administrés. Une violence qui écrase tout sur son passage (la culture, l'histoire personnelle, le sacré...). Ce thème est le coeur du film puisqu'il s'agit de suivre le parcours d'une femme, Clara, souhaitant garder son appartement dans un immeuble prochainement détruit et rénové pour créer un grand espace hôtelier- parc d'attraction-centre commercial moderne. Cet appartement est d'une part pour les agents immobiliers quatre simples murs de briques ou le processus de destruction création est continuellement envisageable et d'autre part pour Clara un espace d'histoire, de vie et de culture. Pour l'un, ce n'est qu'un bien matériel rationnalisable à souhait et pour l'autre c'est un espace disposant d'une âme et d'une histoire. Le film parlera du combat de notre héroïne pour garder cet appart.
Ce thème de la violence symbolique qu'exerce cette société marchande sur ces citoyens se glisse à plusieurs de manière assez discrète dans le film comme avec cette scène ou l'on voit des fossoyeurs déterrés une tombe. On imagine que la concession n'était plus payé (seul raison légale à cet acte) donc on rationnalise la place du cimetière au détriment du mort en question. Le sacré, l'histoire, le respect de la vie de l'homme n'a pas lieu d'être dans cette société.


Ainsi, seul la soumission à ce monde est autorisé, et notre héroïne courageuse décide de lutter contre ce système. Elle part défavorisée dans une lutte fatiguante mais c'est ce qui fait les plus grands héros.


Une autre belle idée du film est cette confrontation entre les deux persos principaux du film. L’héroïne, une soixantenaire que les affres du temps a marqué (elle n'a plus qu'un sein après son cancer) et qui parait assez borné pour son entourage puisqu'elle n'accepte pas de partir de son appart malgré une offre avantageuse.Puis, il y a l'agent immobilier, beau, jeune, souriant disposant d'un air sympathique et compréhensif. Il est l'allégorie de l'ultra libéralisme. Beau et séduisant en surface mais cruel et prêt à tout pour parvenir à ses fins. Son plan pour faire partir Clara le montrera bien. C'est un peu du même accabit quand le jeune Lagardère est invité sur le canapé de Drucker tout décontracté et cool dans son petit pull simple et jean bon marché et qu'il parle de formidable aventure humaine de pouvoir disposer de centaines de milliers de salariés et de nombreuses chaines et journaux. La séduction est la grande arme du capitalisme.
Et ce personnage est d'autant plus cruel et violent qu'il a l'air tout mignon et sympathique. On a sans doute le meilleur bad guy du cinéma en 2016.


Pour terminer sur le film, il faudrait parler de son héroïne. 2016 nous a gaté niveau personnage féminin fort. Julieta, Elle, Carol, Hana et Alice, Harley Quinn (seul perso à sauver du suicide squad), et maintenant Aquarius. Clara est passionnante car son personnage en plus d'être courageuse et forte est le fruit d'une histoire, du temps passé et des cicatrices (au sens propres et figurés) que la vie crée. Cette scène d'intro se déroulant quelques décennies auparavant centré sur un personnage que l'on ne verra plus du film nous montre que cet appartement ou se déroule la scène est le lieu de l'histoire de Clara, de ses souvenirs tristes et beaux offrant tout un background à ce personnage dont la vie est ''derrière elle'' une fois l'histoire commencé. Elle essayera cependant tout le long du film de conserver les saveurs (amoureuses, familiales, charnels...) du temps passé comme elle essayera de conserver son appartement de sa mort programmé. C'est sans doute un des grands sujets du film qui traite de la violence de la société marchande et du temps qui passe et qui balaie tout sur son passage.

Black_Adam
7
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le 23 oct. 2016

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Black_Adam

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