Comme un bien grand nombre de personnes, je ne connaissais comme adaptation cinématographique de la tragédie du Titanic, le fameux film de John Cameron qui traversa les âges et émerveilla les spectateurs de l'époque en salle. Un beau et fringuant Di Caprio et une scène romantique sur la proue du bateau, il n'en fallait pas plus. Dans mon cas, je rajouterai avant tout la beauté angélique de Kate Winslet. Ainsi, surpris par une ignorance cinéphile de premier ordre, je découvris très tardivement ce "Atlantique, latitude 41°" dont l'objectif est de raconter la véritable histoire de Titanic et non la version hollywoodienne édulcorée et niaise de 1997. Si je reconnais avoir une sympathie pour l'oeuvre de Cameron, il faut dire que niveau crédibilité historique, on tire la moue, d'autant plus après avoir vu son ancêtre de 1958.
Pas de romance qui ne tienne ici, le réalisateur s'évertue à une retranscription didactique, presque documentaire des derniers instants des passagers et de l'équipage avant la rencontre, si je puis me permettre, fracassante avec l'iceberg maudit. Il n'y a pas de réel personnage principal mais un conglomérat d'individus qui se démarqueront d'une manière ou d'une autre. L'accent sera mis sur le commandement, ce qui est beaucoup plus judicieux pour se faire une idée du contexte géographique de la catastrophe. Alors que l'iceberg tombait comme un cheveu dans la soupe chez Cameron, ici des calculs sont faits. On utilise le télégraphe, le morse, on effectue des calculs mathématiques pour évaluer les dégâts. On est loin du "Moi je t'aime, je ne te quitterai jamais".
J'ai grandement aimé cette pudeur, ce refus de la complaisance mielleuse, l'absence de pathos. Les instants amoureux sont aussi brefs que beaux. On se quitte, parfois avec fierté, parfois avec tristesse, de peur de ne plus revoir l'être aimé, le tout avec l'orchestre en fond sonore. Est dénoncé aussi la non rigueur des mesures de sécurité navales, la naïveté de croire en le sacro-saint insubmersible. Et plus d'un siècle plus tard, cette inégalité sexuelle flagrante du "les femmes (et les enfants) d'abord".
D'autre part, on se distancie de l'aspect catastrophiste de Cameron avec ses vitres qui explosent par milliers, les tables qui se renversent avec une puissance digne d'un tremblement de terre de 7 sur l'échelle de Richter. On est dans quelque chose de plus posé mais surtout plus réaliste puisque c'est la ligne conductrice du récit. Il fallait s'y attendre quand le projet se base sur les témoignages des dizaines de personnes, membres d'équipage compris, qui ont assisté et survécu (logique !) à ce désastre. Et ça peut sembler être un détail mais l'image en noir et blanc colle mieux (à mon sens) à l'histoire qu'une image en couleurs agrémenté d'effets spéciaux un peu trop prononcés. Dans le cas présent, l'illusion est magistrale. Si "Atlantique, latitude 41°" ne vous procurera pas de grands moments d'émotions, il n'en demeure pas moins un très bon film touchant qui mériterait d'être redécouvert à défaut de se focaliser uniquement sur le Titanic de Cameron dont le goût amer en bouche est apparu grâce (ou à cause de, vous choisirez) au travail du petit Roy.