Un chouette film, globalement.


Le scénario se divise en 4 parties, 4 chapitres ou 4 courtes histoires qui se suivent. C'est assez plaisant à suivre. Ce sont les 1ère et 3ème histoire que j'ai préféré mais les deux autres sont très bien aussi. Le premier segment permet de comprendre les enjeux ; c'est assez étrange parce que si le récit avait débuté dans l'ordre chronologique, cette information capitale aurait été délivrée tardivement ; en agissant de la sorte, l'auteur donne un repère à ses spectateurs, leur donne l'occasion de comprendre où ils vont.


Les conflits sont présents et maintiennent le spectateur en haleine tout au long du récit. C'est glauque, c'est violent. Ç'aurait pu être misérabiliste si l'héroïne subissait directement tous les sévices mais l'intelligence de l'auteur c'est justement de l'impliquer indirectement : ceux qui morflent sans avoir aucune chance de survie, ce sont les autres : sa familles, ses amis. Elle, même si elle est souvent visée, n'est que rarement attaquée directement. De plus, il y a de la couleur dans le film : des personnages qui rient (sans qu'il n'y ait de condescendance), un peu d'humour à l'attention du spectateur : ce n'est pas que du glauque et du malsain et ça fait du bien.


Les personnages sont bien écrits. Du moins les deux principaux. Le reste de la famille recomposée aussi. Mais le meilleur, c'est le méchant. Diantre que cela faisait longtemps qu'on n'avait pas vu un méchant aussi méchant. Mieux : l'auteur ne se gêne pour le faire évoluer, c'est-à-dire le rendre encore plus méchant. Ainsi donc, à la fin, le bougre a tout du Diable. L'héroïne manque peut-être un peu de caractère. Aldrich l'aurait écrite avec plus de répondant. Mais ça fonctionne bien quand même, je ne suis pas mécontent du choix des auteurs.


Les situations sont bien trouvées. C'est vrai qu'il y a quelques coups de mou, justement parce que l'héroïne ne vit pas tous les obstacles, mais il reste de très bonnes scènes, bien exploitées. En fait, chaque segment tourne autour d'une idée principale et vu le temps pendant lequel l'auteur s'y attarde, on peut dire qu'il fait le tour du sujet. Et comme en plus il a de bons personnages à portée de main, cela permet de rendre les scènes encore plus uniques.


Les dialogues ne sont pas ce qu'il y a de mieux dans le film mais on a tout de même droit à quelques répliques bien pensées, qui arrivent au bon moment. C'est surtout le méchant qui en a de bonnes. Et Guy Pearce prend un malin plaisir à les jeter à la gueule des autres acteurs. Les dialogues sont tout de même bons en général, c'était tout dans l'intérêt de l'auteur qui nous parle ici justement du droit à parler, du droit à s'exprimer de la part d'une femme. C'est assez fort d'en parler comme ça. L'auteur ne le dit pas directement, mais clairement les scènes ne laissent aucun doute (surtout lorsqu'il sort ce masque de fer).


À ce sujet, je ne sais pas si c'est ma version pirate ou si c'est pareil pour la version officielle, mais il n'y a pas de traduction pour les langages étrangers (signes y compris). Cela ne m'a pas dérangé, il y a toujours des indices dans les réponses en anglais qui permettent de comprendre. Et si on ne comprend pas, ce n'est pas grave car ces passages sont courts et peu nombreux... c'est comme si le spectateur n'avait pas l'occasion de tout savoir de cet univers. Cela permet d'ouvrir ce monde, de donner l'illusion qu'il existe sans nous, qu'il continue d'exister après le générique de fin (c'est beau ce que je dis, mais c'est du vent).


La fin n'est pas terrible. La confrontation principale laisse un peu sur la faim : la manière dont l'héroïne s'en sort et la brièveté de la scène déçoivent quelque peu. Pour sauver les pots, l'attitude du méchant est juste grandiose. Le film aurait dû s'arrêter là. Ce qui arrive après est sans intérêt : un revirement de situation appuyé d'un mauvais flashback. Très dispensable. Et je vais spoiler un peu ci-bas.


En fait, si c'était pour en finir comme ça avec l'héroïne, alors il aurait mieux valu qu'elle meurt avec son père. Seule la fille devait de survivre, seule. Mais je ne voyais que le sacrifice pour venir à bout de ce monstre. Pourquoi pas le père qui s'accroche à sa fille dans les feux de l'Enfer ? Ou alors la laisser vivre pour plaire au public sensible. Parce que c'est vrai qu'on veut la voir vivre. Mais ce sont justement les personnages qu'on veut voir vivre qu'il faut tuer... mais mourir comme ça, c'est idiot. Cela renforce la question d'injustice, mais cet argument avait déjà été démontré de manière plus efficace plus tôt dans le film.


La mise en scène est efficace. Le découpage fonctionne très bien, épuré, composé de plans réfléchis. La photographie n'est pas travaillée de manière à marquer le spectateur comme cela a pu être le cas dans de bons vieux western, c'est un peu dommage. C'est agréable à regarder, je ne dis pas, mais ça reste assez classique, ça manque d'une patte visuelle un peu plus marquée. Le montage propose un rythme lent mais l'on ne s'ennuie jamais parce qu'il se passe toujours quelque chose dans le cadre.


Le travail sonore est agréable. L'on s'en aperçoit sur quelques plans seulement, les effets sont simples, déjà vus, mais fonctionnent très bien. Les effets spéciaux aussi sont bien travaillés. Je me demande d'ailleurs comment ils ont fait le gros plan final de Guy Pearce. Ces effets paraissent souvent cheap, même dans les grosses productions, et là ça marche super bien.


Les décors sont très chouettes, on trouve également tous les détails nécessaires à rendre cette vie crédible. Le réalisateur en joue au point de créer de belles ambiances. Les costumes sont très chouettes aussi, malheureusement le tout est un peu trop propre, et c'est dommage quand il s'agit d'un western aussi sale.


Enfin, les acteurs font du bon boulot. Le meilleur rôle, c'est Guy Pearce qui en hérite, et il a 'lair plutôt bien content. Il a joué plusieurs méchants ces dernières années, et je dois avouer qu'il ne m'a pas souvent convaincu. Ici, il correspond un peu plus au rôle. En même temps, je trouve que ça rappelle un peu son personnage dans Vorace. Je ne sais pas trop où je vais pêcher ça, mais j'y trouve une ressemblance. Les autres font du bon boulot aussi, dont la petite Dakota (il faudrait qu'elle mange un peu plus la pauvrette).


Bref, j'ai passé un assez bon moment ; dommage que ça finisse sur une si mauvaise note.

Fatpooper
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le 11 avr. 2017

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Fatpooper

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