Cemetery of Splendour, c'est la grâce d'ouvrir les yeux, de rester captivé à ces images d'une lenteur inconcevable, afin de ne pas sombrer dans le sommeil, dans la moiteur d'un fauteuil rouge à l'ergonomie étudié pour la paresse d'un spectateur de cinéma.


Parce que lorsque passé la surprise d'une trop grande lenteur - encore plus grande qu'un Antonioni, c'est dire - le film devient une ode à la beauté, immense, viscérale. Les images ne nous quittent plus d'une semelle, et nous restons captivé par la grâce tentaculaire d'un film d'une trop grande rareté.


La pureté viscérale, l'atmosphère cotonneuse, ouatée, planante, dû à son unique lenteur : vacuité de l'entièreté d'un film, éloge au vide, à l'inertie parmi le monde, pureté qui est presque de l'ordre du sacré, images d'une pureté rare, pleinement renversée pour le besoin du vide, il n'y a plus rien. Rien. Juste des images qui jamais ne bougent, juste des plans d'une indescriptible lenteur, juste des regard, et des êtres qui vivent, qui mangent, qui discutent, avec cette même lenteur, douceur de tout un film.


Cemetery of Splendour est un film sur le temps. L'étirement insérant d'un temps qui demeure intemporel, impalpable, flou dans le brouillard du monde, lenteur qui plane en même temps que la brume dans le cerveau. L'art de ne rien faire avec du rien, et pourtant tout cela est doux, brumeux, léger comme une plume. Nous regardons le monde au travers d'images où le moindre élément chavire, prend sa place dans la pureté du vide. C'est un film. Cemetery of Splendour. C'est un film. Une éloge au vide, au rien.
Une éloge à la vie, la transparence, la pureté bien trop rare.


Un film rare, qui nous emmène jusque dans les méandres du vide, dans l'intérieur d'un nuage, d'un bout de ciel, de mots qui prennent leur temps, prenant leur vie au visage d'êtres humains qui simplement prennent leur temps de vivre.
Éloge à la lenteur qui vague et qui divague. Paresse incessante d'un film dans lequel la rapidité n'a aucun lieu d'être.


Un film qu'il faut savoir apprivoiser, lenteur qu'il faut savoir dompter, afin de ne pas passer à côté de sa seule splendeur.


Parfois, c'est presque de l'ordre du bouleversement. Toute cette pureté figée à la face du spectateur. Profonde beauté viscérale des images d'une rare splendeur.


Cemetery of Splendour, c'est l'immense splendeur d'un film rare. Trop rare.

Lunette
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le 4 oct. 2015

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