J'aime la médiocrité. Voir des personnes dénuées de talent réussir là où tant d'autres mille fois plus méritants échouent, ça me fascine. Enfin, "réussir" à pondre une merde commerciale bourrées de défauts, mais qu'est-ce qu'on en a à branler, ça vend.
Je ne dénigre pas le système; j'en suis un des premiers consommateurs.
J'adore rire de la médiocrité. Eh, j'aurai jamais payé ma place dans le cas contraire. Repérer à quel point c'est navrant, et démonter allègrement ce que tant de personnes se sont faites chier à créer pour un résultat pareil, c'est mon truc. Ça ne fait pas de moi un sombre connard. C'est juste mon côté sadique; chacun en a un, et le mien est somme toutes des plus inoffensif.


Si je vous dis ça, c'est parce que "Cinquante nuances de gris" c'est l'étendard de la médiocrité actuelle.
Si la médiocrité était de l'art, "Cinquante nuances de gris" serait la Joconde.
Si la médiocrité était un animal, "Cinquante nuances de gris" serait UNE PUTAIN DE LICORNE.
Enfin bref, vous avez compris le truc.


Je vais pas m'étendre plus avant sur cet assemblage d'inepties pseudo érotiques écrites par une ménopausée dénuée de tout talent littéraire, et dont le fantasme masculin se résume à un connard qui fait du piano à poil la nuit après avoir dépucelé sa copine à la pince à linge.
On va plutôt s'intéresser au film.
Je peux juste pas résister à glisser ma phrase préférée du bouquin :" Je lui ai ouvert mon âme, et résultat, j'ai mal au cœur et au cul".
Magnifique, j'en pleure putain.


Le film donc, souffre du même problème que Twilight: son matériel de base.
En lui-même, l'objet filmique est carré, sans grands défauts, sans grande force. Là où ça dérape, c'est tout ce qui touche au scénario.
On a néanmoins quelques perles de plans métaphoriques, comme la première fois où Anastasia sort de l'immeuble de Grey, elle claque sa face de jouvencelle en chaleur ver le ciel, il pleut sur sa gueule : "Je mouille"
La même pour le fait de porter allègrement un crayon estampillé "Grey" à sa bouche : "Je suce dis donc"
Et également pour le maquillage excessif avant de partir à la soirée : "Oh mince, j'en ai partout"
C'est loin d'être les seuls, et le plus subtil (c'est tout relatif hein) reste quand Grey fais du piano et que Anastasia va le rejoindre pour lui parler de trucs sur l'amour and shit, et que son drap fait une robe de mariée. Balèze les mecs.


Et puis c'est chiant, il se passe rien putain. L'autre pignoufe elle passe son temps à se morde la lèvre inférieure en gros plan (comme dans le bouquin, où on a cette occurrence toutes les deux lignes), entre deux parties de baise pseudo-sulfureuse, notre gentil couple s'envoie en l'air en hélico ou en planeur, dans des scènes d'un intérêt digne d'un reportage arte sur la culture de la pomme de terre à Maltes.
Parlons en des scènes de cul tiens.
Ben comme le reste du film, il se passe rien.
Le mec dans sa chambre, il a un arsenal de malade. Si on compare la guerre et le sexe, Grey il peut envahir la moitié du monde connu avec ses armes de destructions massives. Et il se contente d'un village de rase-campagne.
C'est comme si on t'amenait dans un supermarché pour te laisser poireauter à côté des Freedent près des caisses.
Tu peux regarder tant que tu veux, tu toucheras pas; le ruban adhésif, les cinquante fouets, les sept-cent battes, le toaster, la batterie de voiture et les pince crocodiles, tu peux oublier.
T'as juste le droit à la cravache, la corde, et le martinet.
Et niveau pratiques sexuelles, c'est la même ; le fist tu peux te le mettre au cul.


Au passage, big up à l'acteur qui joue Grey. Son œil gauche plus petit que son œil droit m'a fasciné pendant les trois quarts du film. "What has been seen, cant be unseen".


Je vais pas parler en détail de la relation complètement conne des deux protagonistes (la scène de dialogue finale atteint à elle seule des profondeurs abyssales de stupidité encore insondées), ou encore des incohérences et des raccourcis scénaristiques wtf-esque (oui, même dans un film aussi vide qu'ici il y en a), notamment la triangulation instantanée du portable d'Anastasia par Grey dans le bar, alors qu'elle vient de raccrocher, opé en quinze minutes jsuis là ma biche.
Par contre, on a quand même le droit à quelques scènes à hurler de rire. Après que ce soit volontaire ou pas, là n'est pas la question. Ma préférée, c'est celle ou Grey couche sa gonze sur ses genoux, et lui balance une taloche sur le cul en gueulant "WELCOME TO MY WORLD", tel une sage-femme fessant un nouveau-né pour voir s'il respire. Je me suis étouffé de rire; c'était tellement glorieux.


Du coup, ce livre/film, t'as deux lectures pour ceux qui tombent pas dans l'attrape-nigauds;
- soit le fantasme d'une mal-baisée qui n'a jamais pleinement vécu sa sexualité;
- soit celui d'une adolescente se faisant des films sur son futur prince charmant normalisé trop dark.
Après ça a été écrit pour vendre, et coller au stéréotype de la ménagère qui aspire à plus que ce qu'elle n'a.
Parce que mesdames, ou messieurs, si ce bouquin vous a donné des idées pour épanouir votre sexualité, c'est triste à crever.


Et je sais pas pour vous, mais moi en tout cas, j'avais plus pleuré comme ça depuis Titanic.
10/10, would bang again.

Swzn
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le 11 févr. 2015

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Swzn

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