Contagion (Steven Soderberg, U.S.A, 2011)

Minneapolis, Minnesota, Beth Emboff, business woman tout juste revenue d’un voyage d’affaire à Hong Kong, est victime d’une attaque, qui après convulsions et spasmes lui ôte la vie. Ce qui ressemblait à une mauvaise grippe s’avère être bien plus virulent. Problème : ce mal dont elle était atteinte peut être n’importe quoi.


Cependant, à Chicago, l’une de ses escales lors de son voyage de retour, des personnes présentent de symptômes similaires à Berh. Quand à Hong Kong, deux cadavres sont découverts dans des lieux à proximités desquels Beth s’est présentée, et les raisons de leurs décès restent inconnues.


Une menace invisible semble planer au-dessus du monde, et elle se repend à vitesse grand V au cœur d’une population laissée à la merci d’un mal qui la frappe au hasard, et qui reste non identifié. Facilité par un réseau aérien mondialisé, des foyers d’infections apparaissent aux quatre coins du monde. La vulnérabilité de sociétés aveuglées par un profit criminel, éclate alors au grand jour.


Le métrage de Steven Soderberg, sur un ton particulièrement sérieux en adéquation total avec la gravité du sujet, prend divers points de vues, afin de créer une vision éclatée et globale de l’émergence, la diffusion, et la prise en charge d’un virus inconnu, et ce à l’échelle mondiale. S’il blâme une mondialisation incontrôlable, et des autorités incapables de réponde rapidement et efficacement à une pandémie qui se déploie à grande vitesse, ce qui intéresse avant tout le réalisateur est l’indice humain.


Face à la crise, Il est ainsi proposé différents portraits allant de la famille lambda du Minnesota (Gwyneth Paltrow, Matt Damon et leurs deux enfants), aux scientifiques du CDC en quête d’une solution pour répondre à l’épidémie (Lawrence Fishburn et Kate Winslet), en passant par une épidémiologiste de l’OMS dépêchée à Hong Kong pour évaluer l’ampleur du problème (Marion Cotillard), ou bien encore un pseudo-journaliste qui vire vers le complotisme, en relayant des fake news sur son blog (Jude Law),


Oui, ‘’Contagion’’ c’est aussi un gros casting au service d’une histoire qui fait froid dans le dos. La description du processus pandémique est tellement minutieuse, qu’elle dépeint sur un ton alarmiste des institutions internationales submergées par une crise qui apparaît incontrôlable. Dans une conjoncture où le temps s’apparente à une véritable course contre la mort.


Alors que Chicago est rapidement placé en quarantaine, des scènes d’émeutes éclatent. La faute à une communication opaque qui laisse la population dans le flou. Elle finit naturellement par péter un câble, et prend d’assaut les grandes surfaces, tels des hordes de zombies, pour les piller, et s’assurer un confort en cas de confinement forcé.


Avec son atmosphère de fin du monde, la situation dérape complétement et les autorités peinent à contenir une certaine paranoïa, alimentée par les théories farfelues d’Alan Krumwiede, le pseudo journaliste dangereux, utilisant son blog pour établir une vision biaisée des évènements, avec le classique : le gouvernement nous ment. Or, c’est bien plus complexe.


Bien entendu, que ce soit pour le CDC comme pour l’OMS, l’objectif est avant toute chose de rassurer. Afin de prendre le temps de prendre connaissance de l’ampleur d’une pandémie ayant fait 25 millions de victimes à travers le monde. Si leur communication est maladroite, c’est parce que leur rôle principal est de semer l’optimisme, dans l’attente de trouver un vaccin efficace, et enrayer la diffusion du virus.


Mais comme elles mettent un temps fou à réaliser ce qui se passe vraiment, quand les populations civiles se trouvent en première ligne, face à l’inconnu, la psychose s’empare des esprits. Ce qui se traduit par l’émergence de la violence et du chaos. ‘’Contagion’’ c’est une œuvre particulièrement réaliste proposant une analyse fine et authentique de la nature humaine, dans sa notion de ‘’masse’’, qui sans la justifier ses débordements, cherche à traduire les effet d’une crise d’ampleur mondiale, capable de faire trembler des sociétés malades et déshumanisées, aveuglées par le profit à tout prix.


Par un message subliminal finement distillée, les différentes aventures humaines présentées se résument finalement à un seul et unique constat (pouvant légitimement faire froid dans le dos) : la vulnérabilité de l’Humanité face à un danger invisible. Ce dernier décime au hasard, sans idéologie, se fichant de la couleur de peau, de la religion, ou des origines sociales. Un virus ça frappe sans plan prédéfinis et sans projet à accomplir, ça se repend à l’aveugle sans différencier les victimes, en aucune sorte.


Il est dès lors très con, stupide, inconscient et dangereux d’aborder la lutte contre un virus, par le biais d’une idéologie martiale mal placée. La gestion d’une pandémie n’a absolument rien à voir avec une ‘’guerre’’ à mener, c’est même absolument tout le contraire. Puisque cela passe par l’organisation drastique d’une population à responsabiliser, et a considérer avec sérieux et respect.


Si l’armée est réquisitionnée, comme par exemple dans ‘’Contagions’’, c’est avant toutes choses à des fins humanitaires. Comme organiser le transit et le confinement des malades, le regroupement des survivant dans des lieux sains. Veiller à l’hygiène générale et bien entendu s’occuper de la sale besogne d’enterrer les dépouilles des malheureuses victimes.


Ce qui permet la sortir d’une telle crise c’est surtout l’entraide et la fraternité, et non pas une idéologie martiale qui cherche à discipliner la population en l’appelant à mener la guerre contre un virus. Organisme neutre, ce dernier se fiche bien de qui peut lui servir d’hôte, à partir du moment où lui est offert la couche et la pitance.


Ainsi, ce que révèle une fois de plus une pandémie, c’est l’absurdité de pouvoirs fantoches répondant à une idéologie qui se nourrit de la destruction massive de la planète, remise brutalement en question par un simple virus. A l’instar du ‘’War of the Worlds’’ d’HG Welles, la vraie menace succombe à un minuscule organisme. Il est alors amusant de faire un lien avec ces Capitalistes qui détruisent tout au nom du sacro-saint profit, avec une idéologie remise sévèrement en question par une pandémie virale.


‘’Contagion’’ est en ce sens une œuvre particulièrement intelligente, qui préfère suivre de près des héros du quotidien, ceux en premières lignes du grand cirque humain qui se met en place à mesure que le problème prenne de l’ampleur. Il faut agir vite, sans semer la panique, tout en essayant de protéger le plus grand nombre d’une mort inéluctable, horrible et douloureuse.


Si le film n’est pas exempt de défauts, comme son complotiste cliché qui aurait mérité un traitement moins stéréotypé, ainsi qu’une escalade de la violence un peu subite, quand les signes ne préparaient pas à ça, ‘’Contagion’’ demeure toutefois un document riche, qui permet de réaliser que oui, l’Humanité est vulnérable aux plus minuscules des organismes, et que demain nos civilisations telles qu’elles sont actuellement peuvent s’effondrer en quelques jours.


La faute à une mondialisation symbole d’un capitalisme sauvage, qui par la soif de quelques dollars, a oubliée qu’en fait l’humanité c’est un bien bien plus précieux que des chiffres sur un relevé bancaire.
Œuvre importante, encore plus d’actualité aujourd’hui en 2020, qu’elle ne l’était en 2011, car à une plus petite échelle, l’épreuve que l’on affronte actuellement avec le coronavirus démontre à quel point Steven Soderberg avait vu juste.


Entre des institutions nationales à la masse, des institutions internationales dépassées par l’ampleur de la catastrophe, les fake news qui pullulent sur les réseaux sociaux, et ces héro/ïnes du quotidien, scientifiques et personnel soignant, en premières lignes. Ceux et celles qui s’occupent en fin de compte du commun des mortels. Sans moyens, que la soif de profit d’États criminels a rongé, mais avec une seule valeur, universelle : la solidarité humaine, tout simplement. Celle par qui viendra la salvation d’une humanité, qui face à l’adversité sait se retrouver.


-Stork._

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le 19 mars 2020

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