Je suis un peu ici dans ma période "j'extirpe de la couche de poussière des films que je possède depuis plusieurs années quand j'avais des goûts et attentes cinématographiques différentes". Loin de l'exigence de maintenant, parfois un peu trop excessive je le reconnais, je vaquais sur la scène rachitique de qualité des films d'horreur amateurs. Et mon chemin, un jour, croisa Contracted, une énième variante du film narrant une infection qui ferait passer les symptômes de la peste bubonique (ne parlons même pas de la blague du covid-19) pour une petite rougeole. La douche froide se fait ressentir dès les premières minutes. Dans un climat de platitude qui ne parviendra quasi jamais à atteindre des moments un tant soit peu percutants, combiné à des acteurs qui donnent plus l'impression d'être là pour boucler leurs fins de mois que d'être intéressé par le concept, on se dit que c'est déjà très mal parti.
Visiblement Eric England a un message à faire passer sur la dangerosité des rapports sexuels non protégés. Une très bonne chose évidemment mais quand on la fait passer de manière aussi poussive avec des gros plans sur le visage sévère du médecin qui veut en savoir plus avec en arrière-plan une caisse transparente de préservatifs et l'héroïne qui ne sait pas trop où se mettre, ben ça ne fonctionne juste pas. Celle-ci est lesbienne et qui dit coucherie hétérosexuelle va systématiquement rimer avec emmerdes, inconscience (l'alcool n'excuse pas l'oubli du préservatif pour info) et tourments internes. Un peu d'alcool, une petite amie absente et un séducteur impénitent dont le visage ne nous sera montré au mieux que flouté et le tour est joué. Notre Samantha va plonger dans un gouffre béant où chaque jour passant verra son état physique se dégrader entre micro hémorragies vaginales et oculaires, pertes de cheveux, ongles et dents. On devine le peu de budget mais le travail sur le maquillage est diablement bien foutu. Haut les coeurs sur ce point !
Maintenant où tout va se péter la gueule comme ça avait un peu commencé au début, ça sera dans la gestion irrationnelle du récit où choix scénaristiques douteux s'accumulent, transformant le film d'horreur en drama de mauvais goût avec une actrice principale proprement exaspérante qui ne se soucie guère trop de sa maladie dont les symptômes causeraient une syncope à n'importe qui. Eric England préfère filmer son quotidien, des rapports tendus avec sa matriarche, une relation au point mort avec sa copine Nikky, ce qui n'est pas pour déplaire à son amie Alice qui aimerait se la taper. Et au milieu le toutou Riley qui ne peut s'empêcher de lui courir après. Est-on dans un film d'horreur ou dans un drame d'amour juvénile à deux balles ? Je n'ai pas arrêté de me poser la question alors que Contracted continuait à se planter. England veut se lancer dans de la psychologie de comptoir, dans le drame social d'une femme dont la vie sentimentale va être mise à rude épreuve par tout SAUF sa maladie. Déjà qu'elle se fout éperdument de sa transformation en monstre et qu'il n'y a aucune chute mentale discernable car elle est de base irritable et antipathique, son entourage n'a pas l'air de s'en préoccuper plus que ça, pas même sa propre mère qui préfère l'engueuler sur sa relation autodestructrice avec Nikky qu'elle voit comme seule responsable de la dégradation corporelle de sa fille. La légende raconte que l'amour destructeur peut causer des vomissements de sang et une perte de la sensibilité au chaud. Pour ne rien arranger, on cale des ralentis sur des scènes comme celle de la douche pour apporter plus de sensualité alors que ça sonne faux.
Voilà ce que je reproche à Contracted, c'est sa distanciation avec l'essence même de l'horreur car naviguant dans des approches scénaristiques diamétralement opposées. De cette maladresse naquit la prétention d'un long-métrage qui se voulait plus intelligent que ce qu'il est, à savoir une oeuvre jamais gérée, incohérente et soporifique. Il se dit que la suite est pire, ça laisse songeur.