Toute personne qui s'intéresse à l'histoire du cinéma connaît le nom de Dalton Trumbo, scénariste au panthéon des grands, à l'instar d'un Ben Hecht ou d'un Raymond Chandler, victime de ses idées politiques dans une société paranoïaque qui les condamnait. Une vie incroyable pour un surdoué des mots et de l'écriture, qui méritait sans doute un autre traitement que ce qu'en a fait Jay Roach, pourtant scénariste attitré de Martin Scorsese.
Première erreur : le film se concentre sur la période "blacklisté" de Trump, période longue et douloureuse il est vrai mais au final insuffisante pour nourrir plus de 2 heures de film. Même si tout le monde connaît le maccarthysme, une mise en contexte n'aurait pas été inutile ; préciser le génie sacrifié de Trumbo non plus, en dehors d'un demi-tournage de Sam Wood avec Edward G. Robinson. Et quelle frustration de ne pas en apprendre un peu plus sur la méthode de travail de Trumbo, en dehors de sa baignoire !
C'est d'autant plus dommage que le casting brille de mille feux, à commencer par Bryan Cranston évidemment. Hélas, à force d'empiler les redites (les scènes de dispute, d'écritures de série Z et de réunions autour d'un whisky) et de lancer pléthore de pistes sans jamais les poursuivre (l'impact de la mise à l'écart de Trumbo sur sa famille, les difficultés de subsister dans un milieu de strass et de paillettes tout en restant dans l'ombre, l'hypocrisie des stars de l'époque), le film devient lassant, plat, voir un peu terne. On n'apprend finalement pas plus qu'en lisant l'autobiographie d'Elia Kazan ou le film La liste noire d'Irwin Winkler avec Robert de Niro. C'est d'autant plus dommage que Trumbo n'a eu cesse de lutter, à sa manière, artistique, contre le maccarthysme, contre la dictature de la pensée unique, contre l'oppression sous toutes ses formes dans les années qui ont suivi sa mise à l'écart. Au final, la vie du bonhomme aurait mérité un autre traitement, plus virulent, plus acide, plus "trumbiste" que ce plat préparé pour les Oscars. Vraiment dommage.