Quentin Tarantino est considéré par les cinéphiles du monde entier, moi y compris, comme un prophète, ses fidèles suivent avec attention ses déclarations dans ses diverses interviews, ne manquant pas de visionner tout les films qu’il cite, pour mieux identifier les références qu’il en fait, et qui sont magistralement insérées dans des scènes peaufinés à l’extrême. Lorsque le maitre a avoué être fan de Spaghetti Western, productions italiennes qui ont cartonné de 1964 jusqu’à la fin des années 70, avec des réalisateurs brillants tels que Sergio Leone et Sergio Corbucci, les fidèles n’ont pas manqué de visionner ces films, on peut même dire que Tarantino a relancé l’intérêt pour ce genre. D’ailleurs, un Top 20 de ses Spaghetti Western préférés est disponible sur le site Spaghetti Western Database (swdb.com). A compter de l'annonce que Tarantino travaillait sur un film rendant hommage à ce genre, une attente interminable a commencé, ponctuée par une traque de tout les détails concernant cette production, dont la plus fameuse est le leak du script de
« Django Unchained », que j’ai eu tout le mal du monde a ne pas lire afin de ne pas me gâcher le plaisir du film, ou me spoiler comme on dit dans le milieu des cinéphiles. Aujourd’hui, j’ai enfin pu visionner « Django Unchained » plusieurs fois, et mes attentes n’ont pas été déçues.

Le film débute avec le thème principal de « Django », réalisé par Sergio Corbucci, une référence du spaghetti western qui a engendré une multitude de fausses suites avec des héros portant le même nom, cette introduction montre la capacité de Tarantino à assimiler parfaitement tout les codes d’un genre, on retrouve ainsi tout les clichés, les gros plans brusques, les paysages de western, les duels au flingues à six coups, la police du casting et les compositeurs tels qu’ils étaient présentés dans les films de l’époque, le tout avec une combinaison exquise de musique et d’images qui se retrouvera par la suite du film à de nombreuses reprises, d’une manière inattendue parfois. Concernant la musique, on retrouve le nom du légendaire Ennio Morricone, le maitre avait rejeté l’offre de Tarantino pour composer la musique de « Pulp Fiction », considérant qu’il n’était pas assez connu, cette fois il a daigné signer plusieurs compositions originales pour notre plus grand plaisir.

Après ce générique de grande classe, on se familiarise peu a peu avec l’intrigue, un dénommé Dr. Schultz, chasseur de prime allemand, achète Django pour l’aider à traquer les Freres Britlle, Dr. Shultz apparait soudainement dans une forêt pour acheter Django à ses négriers, on ne sait pas exactement comment il a su qu’ils passaient par la, mais tel un personnage de conte de fées, on y croit sans trop se poser de questions. Les deux héros partent ainsi à l’aventure, et se crée tout le long une amitié qui incite le Dr. Schultz à aider Django à libérer Broomhilda Von Shaft, son épouse vendue à un affreux propriétaire de Candyland, une plantation de coton, du nom de Calvin Candie.

« Django Unchained » n’est pas un Spaghetti Western dans le sens conventionnel du terme, il a été tourné au États-Unis avec un casting dans sa quasi-totalité américain, mais comme à son habitude, Tarantino réussit à s’inspirer d’un genre de cinéma qualifié d’exploitation movie pour l’amener à un niveau supérieur, un peu comme ce qu’il avait réussi à faire sur « Death Proof », avec les films de courses poursuites en voitures. Ainsi, « Django Unchained » est truffé de références, j’ai pu relever « Django » évidemment, à travers la présence de Franco Nero, « Il Grando Silenzio », « Il Mercenario », tout trois réalisé par Sergio Corbucci, mais aussi « Quien Sabe » pour la présence d’un héros étranger dans un western américain, ou « Se Sei Vivo Spara », pour le personnage de Billy Crash, à la sexualité ambigüe. Je suis sur que j’en ai raté beaucoup, n’ayant pas la prétention d’avoir visionné autant de films que le maitre en action, mais je vous invite à regarder son Top 20 de Spaghetti Western pour mieux apprécier par la suite les nombreux clins d’œil présent dans ce film épique.

Les acteurs du film donnent leur meilleur d’eux même, aidés par les dialogues exquis proposés par le script, Christoph Waltz qui s’est illustré en Nazi polyglotte et cruel dans « Inglourious Basterds », brille dans le rôle du Dr. Schultz, et on peu s’attendre à le voir encore dans les prochains films de Tarantino. Leonardo DiCaprio incarne ici à ma connaissance son premier rôle de méchant, et il jubile littéralement dans celui-ci, une facette de l’acteur que l’on ne connaissait pas jusqu’ici, et qui montre la maturité qu’il a acquise notamment sous les commandes de Martin Scorsese, loin est l’époque du blondinet qui s’est fait connaitre aux yeux du monde entier par son rôle dans « Titanic ». Personnellement, mon personnage préféré reste celui de Steven joué par Samuel L. Jackson, maitre de maison servile, noir privilégié qui profite de sa position pour faire la misère aux esclaves présent à Candyland, il illustre parfaitement le système selon lequel un groupe d’individu est dominé par un autre, seulement grâce à la collaboration d’un membre du groupe dominé, il a surement fallu du courage pour Samuel Jackson pour incarner ce rôle. Concernant le personnage principal, Django, Jamie Foxx (ayant remporté un oscar pour « Ray » quand même) remplit parfaitement son rôle, cependant, il ne dégage pas la folie, ou le génie des autres acteurs que je considère plus expérimentés et talentueux que lui, il s’agit la de mon seul point de déception par rapport au film, mais il reste néanmoins minime. Apparemment, le rôle de Django aurait été écrit par Tarantino avec Will Smith en tête, mais ce dernier a rejeté l’offre à cause de conflit dans les agendas des deux intéressés, peut être que s’il avait accepté le personnage aurait été meilleur, ceci dit, personne ne le saura jamais.

Pour finir, « Django Unchained » est un film très divertissant et captivant malgré sa durée conséquente de 2h45, de nombreuses critiques ont été émises sur la violence extrême affichée ou l’utilisation exagérée du mot nigger (nègre) qui constitue un sujet sensible au état unis, personnellement, je trouve que l’exagération donne un aspect comique au film et aide à faire passer la pilule, en tout cas si le génie de « Django Unchained » ne paraitra pas évident à tout le monde, il constitue néanmoins un film et un western de génie.
Salboy
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le 21 janv. 2013

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