Quand tu te mattes un David Lynch, tu sais, hormis exceptions, que tu vas devoir faire travailler tes méninges, qu'il est pas question de se regarder cela comme si on se mattait le dernier film de Michael Bay. Paradoxalement, tu sais aussi que tu ne comprendras pas toujours tout, mais malgré tout, tu aimes ça. Eraserhead, c'est le premier long de Lynch et tu retrouves déjà de ces caractéristiques dans le film.

Lynch comme à son habitude travaille sur la symbolique et laisse au spectateur la manière d'interpréter le film. Eraserhead fait partie de cette catégorie et c'est donc avec plaisir qu'on va pouvoir analyser cette oeuvre, qui peut être vue de plusieurs manières.

D'un point de vue formel avant tout, on constatera que le film est d'un noir et blanc, léché, travaillé et proche de l'expressionnisme. On notera aussi que Lynch a réalisé un travail sur l'ambiance sonore qui est exceptionnel. Les acteurs surtout Jack Nance semblent prendre part de manière naturelle à la folie du cinéaste.

Alors, voilà, comment aborder ce film de Lynch? D'une part, je trouve qu'il y a un côté assez apocalyptique à son film ou tout du moins post-apocalyptique comme j'ai déjà pu le lire. Le père de la jeune femme qui évoque l'enfer dans lequel il se trouve et qui se souvient de comment c'était avant. On dirait qu'un désastre quelconque a touché la planète comme une explosion atomique, ce qui expliquerait de manière logique la naissance d'un bébé mutant. Toujours est-il que c'est un monde froid, de fer et d'acier où la population semble pauvre, folle et totalement apathique dans certains cas. Il y a aussi ce bout de terre conservé dans la pièce.

Mais chez Lynch, il n'y a absolument rien de conventionnel, de logique. On a au fond ici un esprit torturé, celui d'un homme qui refuse la paternalité, son mal d'évoquer la sexualité. Le monstre n'est pas un homme et on se rapproche de Kafka et de La Métamorphose. Pour fuir la réalité, Henry rêve et plonge de plus en plus dans un autre monde, une réalité qui ne semble plus lui convenir.

Il y a cette scène incroyable où l'homme perd sa tête pour se retrouver avec celui du bébé monstrueux. Son cerveau est utilisé pour créer une gomme qui efface ce qu'on écrit. Le titre du film vient de cette séquence de la tête qui efface. Mais qu'efface-t-elle ? S'agit-il de la confirmation de la fuite de la réalité de cet homme ? S'agit-il d'autre chose ?

En fait, de ce film de Lynch est des multiples interprétations qui peut en découler, on pourrait en parler des heures entières. Je regretterai juste une absence légère d'émotion sur un point : le film a un côté humoristique par la stature des personnages, la coupe de Henry, etc. Mais c'est une forme d'humour qui ne me touche guère.

Mais sur le fond, quel génie.
batman1985
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le 7 oct. 2014

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