I told you so
Bon, pour ceux qui n'ont pas vu le film, passez votre chemin. Ce qui m'a attiré de prime abord, c'est le "genre : horreur" annoncé par la com sur la toile couplée au pitch: "Chris est noir. Chris...
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le 22 mai 2017
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Je vais répéter ce que j'ai déjà dit dans ma critique de Split, mais : comment peut-on continuer à défendre Blumhouse quand cette boîte ne fait qu'enchaîner les films à petit budget sans talent et sans idée, et qu'elle truste de plus en plus les multiplexes en condamnant les autres à rester dans l'ombre ? J'étais sincèrement prêt à laisser sa chance à Get Out. J'avais de la sympathie pour son pitch étrange, ses bande-annonces WTF. Comme beaucoup de fans de cinéma bis, je suis sans cesse en demande d'un genre dont la qualité se mesure souvent au culot dont est prêt à faire preuve le réalisateur ; culot dont Get Out semblait largement pourvu, à en croire son marketing finement étudié. Mais là encore, j'ai déchanté. Et, là encore, Blumhouse a révélé sa principale compétence, qui est en train de devenir la seule : faire monter le buzz, faire cliquer les cliqueurs, faire chroniquer les chroniqueurs. Depuis quelques années, la méthode Blum est devenue simple, il faut qu'on parle de ses films. Outre l'incompréhension que m'inspirent les critiques dithyrambiques qui polluent l'affiche et l'excellente réception publique, je suis de plus en plus dubitatif devant la qualité intrinsèque des films de cette marque, malgré des débuts très encourageants avec Insidious et Sinister, pour n'en citer que quelques-uns (et qui m'avaient fait dire, à l'époque, que Blumhouse allait peut-être sauver l'industrie du fantastique U.S...).
Qu'est-ce qu'on a dans Get Out ? Encore une fois : des acteurs transparents, sans présence à l'écran (une pensée émue pour l'empâtée Catherine Keener, qui a l'air d'être venue pour le chèque) ; des jump scares qui font péter les enceintes pour quasi-seul moteur de frissons ; un petit peu de gore mais pas trop pour ne pas avoir de problèmes de visa d'exploitation ; un versant psychologique si nullissime qu'il verse dans le navet, malheureusement non assumé. L'histoire est débile, tout en parvenant miraculeusement à susciter des louanges qu'on peut soupçonner de plus en plus être nourries par des médias locaux arrosés de Mountain Dew. Et il faut dire, au final, qu'on a peut-être été un peu naïf. Question à un million de dollars : comment peut-on faire un film d'horreur sur le racisme dans une Amérique hantée par ce problème de société ? C'est simple : en n'en faisant pas. Jason Blum n'est pas idiot, son but n'est pas de devenir le poil à gratter d'un pays puritain. Ce simple constat suffit à démonter la soit-disant provocation que serait Get Out, lequel, en réalité, n'invoque le racisme que pour nourrir ses propres chiffres de vente. Avec ses constantes tentatives de désamorcer l'angoisse par un humour volontairement lourdaud, le film passe son temps à essayer de dire qu'il ne veut ni choquer, ni effrayer. L'effroi, on se le prend par deux ou trois sursauts liés à une brusque montée de volume (comme d'habitude) et par un mini (mais vraiment mini) intermède sanglant qui doit durer 5 minutes montre en main sans que n'en jaillisse la moindre nervosité. Petit budget oblige, Jordan Peele joue un maximum du hors-champ ; mais ici on ne parle pas de hors-champ calculé à la Haneke, non, plutôt du hors-champ de cut-scene de jeu vidéo qui n'aurait pas la thune pour animer ses personnages et qui préfèrerait coller un bruitage Universal Soundbank pour dire qu'un coup de feu est tiré. Toujours aussi pathétique et malvenu dans ce genre de films survendus comme des chefs d'oeuvre de mise en scène, qui exsudent à chaque instant leur côté bricolé.
Vous me direz : un film "suédé" pourrait avoir de la gueule. A condition que Get Out en soit un. Le problème c'est qu'on ne parle pas du premier petit producteur venu qui galérerait à monter son projet et s'autoriserait des paresses pour sauver sa sortie en salles. Ici, on parle d'une maison de production qui, en dix ans, est passée de petite boîte à leader mondial de la production horrifique. Dans une approche relativement similaire, le petit et fauché "You're Next" faisait littéralement cent fois mieux. Pourra-t-on bientôt s'inquiéter du fait que de telles réussites resteront sans lendemain si leurs réalisateurs refusent de tapiner pour Jason Blum ? Sans nul doute. Je n'ai pas eu peur devant Get Out. Je n'ai pas été choqué. Je n'ai pas été mal à l'aise. Je n'ai pas ri là où il fallait. Je n'ai pas été imprégné par la psychologie extrêmement simpliste des personnages - sauf peut-être pendant les vingt premières minutes, quand j'ignorais encore qu'aucune des bases posées dans ce prologue ne servirait à quoi que ce soit. Get Out est un film tourné, monté, joué à la va-vite. Aucune de ses idées n'est neuve, à peine quelques-unes sont correctement mises en oeuvre, mais quasiment rien ne me semble réellement recevable pour quelqu'un qui a déjà regardé de bons films d'horreur dans sa vie. Même un film "mainstream" d'il y a une dizaine d'années sera nettement préférable à ce bousin : prenez le premier venu, un Christopher Smith, un Adam Wingard, un James Wan, un Scott Derrickson, un Fede Alvarez... vous obtiendrez quelque chose de sans doute imparfait, mais d'autrement valable que cet énième foutage de gueule aux fétides relents marketing qui éloigne un peu plus à chaque sortie Jason Blum du producteur jadis brillant qu'il fut.
Créée
le 8 mai 2017
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