Quand il n'y a plus de place en enfer, les daubes reviennent sur terre ?

Alors, c'est ça, le film bouh-qu'il-est-nul qui a été unilatéralement décrété comme la nouvelle tête de turc par la critique tête-à-claques? Un film sur lequel des fatwas ont été lancées sur la base d'UNE seule bande annonce ? Et que certains écrivent même sans aucune honte qu'il faudrait qu'ils se tapent les comics maintenant qu'ils ont assisté à cette purge anticipée ?


...


C'est à désespérer parfois.


Car Hellboy ne mérite pas cette unanimité suspecte dans la dénonciation et le lynchage, qui a plus été le fruit de la colère provoquée par l'annulation du troisième épisode de la série de l'enfant chéri de la communauté cinéphile. Dans un retournement de veste assez savoureux, du reste.


Mais je m'égare.


Hellboy commence comme s'il avait la volonté de couper le cordon. En effet, il n'est sans doute pas innocent que le cornu débute son aventure dans la patrie du généreux Guillermo Del Toro, en reprenant au passage le premier récit de La Fiancée de l'Enfer : Hellboy au Mexique. Sans doute histoire de souffler à l'oreille du spectateur qu'il devra faire son deuil de son désir et d'apaiser sa colère. Car si une séquence au coeur du film fera clairement référence à l'imaginaire du mexicain, Hellboy sera immédiatement relocalisé en quasi intégralité en Angleterre, ainsi que dans l'univers très série B de Neil Marshall, artisan consciencieux et immédiatement sympathique.


Neil souffrira sans doute de la comparaison avec Guillermo, parfois à raison. Mais il ne faudrait pas perdre de vue que ses deux opus sont bien plus proches de son univers sensible et romantique, surtout Les Légions d'Or Maudites, ce qui fit grincer des dents Mike Mignola, le papa du démon.


Mais l'amour était sincère et les oeuvres de très jolies "trahisons", à l'image des écrits de Dumas, qui affirmait qu'on pouvait violer l'histoire à condition de lui faire de beaux enfants.


Ce Hellboy new look sera ainsi infiniment plus proche de son matériau d'origine. Moins noble, moins magique, beaucoup plus rugueux et ténébreux aussi. Au cours d'une aventure basique, mais qui reprend cependant une myriade d'éléments du comics, en les traitant et en les agglomérant de façon parfois brillante. Notamment La Grande Battue, arc indispensable du personnage, et menant inéluctablement, bien sûr, à l'affrontement avec la reine de sang.


Hellboy permet au bestiaire de Mignola de prendre vie de façon fascinante. et si ces idiots de Première inscrivent dans la colonne des mauvais points "un gloubi boulga de références mythologico-littéraires qui n'évite pas la redite", ceux-ci n'évitent pas le ridicule, puisqu'il s'agit là de l'inspiration même d'un Mike Mignola pourtant portées aux nues dans son domaine...


On n'est plus à une bêtise près, de toute façon...


Et Hellboy de proposer une série B king size et totalement décomplexée dans le spectacle qu'il propose, d'une violence rare, enchainant les plans chocs et certaines visions de pure apocalypse. Il ne sera pas interdit de prendre son pied devant l'écran, à la fin de certains plans tirés directement du comics, où les monstres déferlent et ou pleins de figures familières apparaissent de manière respectueuse dans une oeuvre brute, cent pour sang pulp trainant sa dégaine sauvage à travers différents registres du genre horrifique.


Comme l'oeuvre d'origine, quoi.


Hellboy semble plus jeune, et piégé dans un corps d'adulte. Sauf que quelques défauts en découlent, comme cet humour, pas envahissant, mais dont certaines piques sont loin de faire mouche. Ou comme cette modernisation de certains éléments de l'intrigue, entrant de plein fouet en contradiction avec le ton résolument horreur de l'oeuvre, en forme de décalage parfois très décevant.


Enfin, il sera parfois rageant de constater qu'un personnage clé du comics soit transformé en vulgaire sidekick, Tandis qu'un invité tout droit issu du spin off B.P.R.D. ne soit voué à jouer les utilités.


Le thème de la parentalité sera traité, lui, de manière maladroite, ne donnant jamais à Ian McShane l'occasion de s'illustrer.


Mais ces quelques réserves passées, Hellboy fait passer ses deux heures de durée comme un souffle, Neil Marshall se montrant à la hauteur du matériau qu'il adapte, se révélant s'inscrire à merveille dans son univers et son style, rejoignant des oeuvres comme l'ultra fun et référentiel Doomsday ou encore le solide Centurion.


On est donc assez loin du ratage que certains dénoncent à cor et à cri. Hellboy "n'est" qu'une série B intense et roborative, aussi maladroite, parfois, qu'elle se révèle impolie et énergique. Loin d'être un chef d'oeuvre mais valant bien plus que sa déjà triste réputation, Hellboy se révèle avant tout fidèle tant à sa source papier qu'à la sensibilité de son réalisateur.


Pas de quoi voir rouge, en somme...


Behind_the_Mask, qui a peur de porter les cornes.

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le 8 mai 2019

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