Sa force, Hostel la tire de son économie déployée dans l’outrance ; parce que les pires tortures ne sont pas celles montrées mais celles que l’on pense pouvoir se produire, le film a recours à l’énergie imaginative du spectateur comme levier horrifique suprême, se contentant de piéger ses protagonistes et de leur faire miroiter une possible échappée sans suivre de schéma préétabli. Les réactions n’ont de cesse de surprendre, à la fois naïves et solidaires face à des situations où la survie semble être la seule préoccupation enviable ; c’est par toute une palette d’émotions que passe le spectateur terriblement investi dans cette intrigue : on rit on hurle on souffre on se réconforte enfin. Rarement film avait aussi justement exprimé et mis en images la dimension cathartique inhérente au cinéma, et surtout au cinéma d’horreur : les passions des plus riches – blasés de tout au point de mettre à mort leurs semblables – sont purgées dans le sang tels les désirs à moindres coûts d’étudiants venus profiter de leur jeunesse s’assouvissent dans le sexe. Un même plaisir, dirons-nous, mais deux niveaux d’accès. Quand l’hôtel de l’amour se mue en parc d’attraction de la mort… Eli Roth livre une terrifiante et pessimiste fable sur l’espèce humaine et le plaisir sadique qu’elle prend à se mutiler : sa mise en scène diffuse savamment, derrière des cadres apparemment plats, une tension qui ne retombera qu’au générique de fin ; son travail sur le son accentue davantage encore la crispation que l’on ressent – inévitablement – devant cette œuvre à l’efficacité redoutable et au propos fort. Une immanquable.