Vu entre 5 et 10 fois.

Lorsque le générique très James Bondesque et supra-kictch de ce second épisode de la saga Indiana Jones débute, dans un cabaret à la fois glamour et malfamé de Shanghai, les merveilleux souvenirs du premier film, couplés à une sensation de bientôt découvrir encore plus d'exotisme (asiatique), de bagarres et de délicieux cabotinage d'Harrisson Ford, donnent une banane immédiate. D'entrée de jeu, Indy est en pleine affaire, négociant l'échange (la vente ?) d'un antique artefact à une bande de chinois n'inspirant aucune confiance (dans Indiana Jones, le chinois est très fourbe, ça c'est une philosophie de vie à ne jamais perdre de vue). Tout de suite, Indy fait l'étalage de sa connaissance du terrain, de son côté « aventurier jusqu'au bout du fouet », en menant une négociation aussi nerveuse et tendue qu'un échange de ping pong.

Mise à mal du héros, abattage d'un nouvel argument, nouveau retournement de situation, allié imprévu... l'échange autour de cette table tournante commence très bien, avant de dérailler et partir en cacahuète quand débutent les symptômes de l'empoisonnement du héros. A partir de ce moment-là, nous avons droit à du mauvais Spielberg, poussant trop loin le bouchon sur le comique et les gags, au détriment de la cohérence de sa scène. La double recherche du diamant géant et de la fiole antidote, la foule qui panique, les ballons qui tombent sur la scène, le canardage du gong à la Thompson, Indy qui saute par la fenêtre et tombe pile poil sur la voiture de son complice, tout est too much dans cette scène d'introduction, par rapport à la légèreté et la fluidité du premier film.

Puis vient le voyage en Ford Trimoteur (gahhhh, fallait le trouver celui-là !), qui enfonce le clou sur la fourberie des chinois, capable d'abandonner un avion en plein vol avec un sourire gros comme ça ! Indy, flanqué de ses acolytes du jour, le génial Demi-Lune et Willie le boulet intégral, tombent du ciel et atterrissent en Inde, où ils vont découvrir l'intrigue principale du film, elle aussi tombée du ciel. Parce que quand même, un archéologue aventurier qui s'écrase sur un village maudit depuis qu'on lui a volé sa pierre sacrée, on a vu scénario plus construit. Heureusement, le vieux sage du village, qui ressemble à un Doc Brown à la peau mate, arrive à justifier la nonchalance des scénaristes en avançant les arguments mystiques du destin et de l'envoyé des dieux, chargé de ramener la prospérité dans ce pauvre village maudit.

90% du film se déroulent en Inde, pays présenté sous sa forme mystique, ancestral, misérabiliste. Ce paysage, ce contexte, l'intrigue de renaissance d'une secte sombre pratiquant l'esclavagisme infantile et les sacrifices humains, font de cet Indiana Jones II un film terriblement sombre, crade et violent par rapport au reste de la saga. Le village asséché fait peine à voir, tout comme ses habitants, presque mort de faim à l'arrivée d'Indy. La jungle est poisseuse, hostile, peuplée de sales bêbêtes, qui n'intimideront pas trop Indiana, mais vont faire débuter le cauchemar de Willie.

Attardons-nous sur le trio de héros. Plus encore que dans le premier film, Indiana Jones forme une équipe dans le temple maudit. Lui-même n'a pas tellement évolué par rapport à sa première apparition. S'il porte le costume mondain pour parler business en ville, il réenfile vite son attirail d'aventurier, qu'il va se faire un plaisir de transformer en guenille au fil du récit, pour émerger en héros musculeux et couvert de sueur d'une classe folle lors du bouquet final de la dernière demi-heure.

Comme on lui a collé une précieuse plus à l'aise dans le confort de la ville ou les ors des palais que dans la boue ou les sous-terrains, notre Indy se pique à la taquiner et à devenir encore plus macho qu'il ne l'était déjà. Sa personnalité de baroudeur est en effet mis en valeur par le contraste qu'il forme avec sa nouvelle partenaire, Willie, meneuse de revue sophistiquée embarquée au milieu de l'Inde contre son grès et qui va se faire un plaisir de hurler son dégout de la vie d'aventurier pendant près de deux heures ! Willie, c'est le boulet absolu, l'anti-Indy, la femme qui ralenti tout le monde, n'arrête pas de se plaindre et de crier à la vue du moindre insecte, squelette, serpent ou autres poncifs incontournables du quotidien d'aventurier. Si la gent féminine n'avait pas trop à se plaindre de sa représentante dans le « Secret de l'Arche Perdue », là il y avait motif à un recours devant les tribunaux des chiennes de gardes !

Et il faut dire que Spielberg s'est amusé à martyriser la pauvre Willie, en la propulsant dans l'épisode le plus crade de l'ex-trilogie. Après l'extrême misère du village Indien, nous découvrons le palais du Marajah, dont le luxe ne cache pas longtemps les goûts et les us un peu « exotiques » de ses locataires. La scène du repas à la table du Marajah est l'une des plus mémorables de la saga, les Indiens se régalant de mets tels que des anguilles vivantes, des scarabées farcis, une soupe aux yeux ou des têtes de singe en sorbet ! Pouah, sur ce coup là, j'ai toujours été comme Willie, dégouté par cette grande bouffe peu conforme aux normes occidentales. Et pendant ce temps-là, Indy parle le plus sérieusement du monde des histoires de sectes et de malédictions avec le premier ministre et le représentant de l'empire Britannique, quelle prestance !

Autre scène inoubliable quand on a été un enfant des années 90, l'exploration des souterrains secrets du palais, entre pièges acérés (le plafond à pics qui s'abaisse, s'eut été un crime de ne pas l'intégrer dans un Indiana Jones !) déjà rempli de vieux cadavres, et de millions (MILLIONS !!!) d'insectes grouillants partout. Je ne suis pas arachnophobe et je fais preuve d'un courage au-dessus de la moyenne face à des insectes ou des vers, mais cette scène, entre les cafards qui grouillent et les phasmes géants qui se logent dans le creux de la main ou dans le cou, brrr, vraiment, pauvre Willie !

Heureusement, pour compenser la bouletude de Willie, il y a Demi-Lune, l'orphelin Chinois associé d'Indy. Débrouillard, fidèle en amitié, émerveillé par son éléphant, joueur/tricheur de Poker, apprenti ninja castagneur, il m'a toujours attiré la sympathie, si ce n'est suscité la jalousie : c'est le pote d'Indiana Jones quoi ! Et le personnage devient génial quand il est le dernier résistant suite au lavage de cerveau du héros, et s'enfuis de la mine pour aller le sauver. Bonne barre de rire également quand il balance des coups de pieds retournés sur les gardes de la mine, des mastards de 110 kg, sans grand effet. Ou quand, dans ce film très politiquement incorrect (mon dieu, Hollywood n'oserait jamais refaire un film pareil aujourd'hui !), il se bastonne franchement avec le jeune Marajah pour l'empêcher d'utiliser sa poupée vaudou, en même temps qu'Indy affronte le gros costaud de l'épisode. C'est d'ailleurs à ce moment-là que l'on assiste à la mort cruelle made in Indiana Jones, quand le costaud se prend dans un concasseur de pierres et fini en purée.

Car après une grosse première heure assez déstabilisante consacrée à la portion aventure/exploration, débouchant sur la découverte du fameux temple maudit, paroxysme rougeoyant de la misère et de la cruauté de l'intrigue (les enfants du village y sont tenus en esclavage pour miner la montagne, et les hommes fonts l'objet de sacrifices humains, remember le prêtre arrachant le cœur battant du pauvre sacrifié), quand le spectateur est désespéré et révolté par tant d'injustice, Indiana Jones sonne l'heure de la révolte ! Le contraste de cette dernière demi-heure est étonnant, l'action et l'humour font leur apparition en force, Indy pète le classe comme rarement quand il sa silhouette chapeautée surgie de l'ombre et dégaine un bourre pif des familles sur un garde, qui vole et glisse comme dans les cartoons.

A partir de là, l'aventure laisse place à l'action et le film change du tout au tout, passant de l'obscurité permanente à la lumière. Indy retrouve ses esprits au cours d'une bagarre typique de l'esprit de la série, pressé à la fois par les vagues d'ennemis et l'inexorable fermeture d'un piège, puis la libération des enfants est jouissive. Les gardes déboulent de tous les coins, presque aussi nombreux que les nazis habituels, et le héros s'engage dans une autres grande scène, tellement marquante qu'elle en a inspiré les parcs d'attraction ou le jeu vidéo (Donkey Kong Country) : la poursuite en wagons miniers au fin fond des galeries de la montagne, avec échanges de coups de poings, caprices d'aiguillages, déraillage des malheureux méchants sbires, frein cassé et semelle de chaussure brulée...

C'est à ce moment-là qu'Indy auto-parodie son meilleur gag, celui du « revolver contre sabreur fou », mais... sans revolver ! Pas grave, le fouet fera l'affaire, après tout, Indy n'a pas peur de se battre à 1 contre 2. En revanche, 1 contre 30, c'est une autre histoire !

Enfin, la scène du pont suspendu sur le fleuve à crocos (qui ont faim et savent pertinemment que des casses croutes les attendent au-dessus de leur tête) présente une nouvelle fois un Indy courageux et déterminé, brandissant haut le sabre qu'il vient de récupérer en vue d'intimider ses poursuivants, avant de faire le grand saut et d'être sauvé par la cavalerie (britannique).

Si, globalement, le film est déroutant et à mon avis moins bon que le premier, cette dernière demi-heure est une libération, et le final bien mieux maitrisé. Le rythme n'arrête plus d'accélérer, le triomphe du bien est jubilatoire, et cette banane qui avait commencé à poindre lors du générique d'intro revient en force quand Indy rentre en héros, avec la pierre sacrée et les enfants, dans un village en fête redevenu fertile et souriant. Alors que le The End s'affiche à l'écran, on en viendrait presque à demander «pas maintenant, encore un peu s'il vous plait ! ».

Les plus :
_Demi-Lune est cool.
_La confrontation Indy/Willie fait des étincelles
_Bon appétit...
_Le train de la mine !
_Le gag du sabreur revisité
_Une dernière demi-heure géniale
_Un comte sombre qui finit bien

Les moins :
_Beurk que c'est cracra
_La scène d'intro à Shanghai à moitié ratée
_L'intrigue tombée du ciel
_Très long à démarrer.
_Willie fini par devenir casse bonbon.
_Ils sont où les nazis ?
Dauntless
8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 4 févr. 2012

Critique lue 409 fois

2 j'aime

Dauntless

Écrit par

Critique lue 409 fois

2

D'autres avis sur Indiana Jones et le Temple maudit

Indiana Jones et le Temple maudit
SanFelice
9

Mola Ram

Pour commencer, mettons-nous d'accord sur une chose : Indiana Jones, c'est une trilogie. Je sais bien que certains prétendent avoir entendu parler d'un épisode 4... De plus grands menteurs affirment...

le 17 août 2013

82 j'aime

25

Indiana Jones et le Temple maudit
Torpenn
7

Les Indes Noires

L'extrême médiocrité du quatrième épisode avait rehaussé un bref instant celui-ci dans mon souvenir. Maintenant que cette immondice n'est plus qu'un lointain et vague cauchemar, tous les défauts du...

le 12 août 2011

82 j'aime

40

Du même critique

La Bataille d'Angleterre
Dauntless
8

Tu veux qu'on en parle BoB ?

La Bataille d'Angleterre est un film de guerre oldschool, un de ces nombreux classiques tournés durant les 25 ans qui ont suivis la fin de la Seconde Guerre Mondiale. Ces films étaient souvent de...

le 13 oct. 2013

7 j'aime

3

Black Mesa (mod)
Dauntless
9

Back in Black... Mesa

Half Life… Je l’ai terminé 4 fois depuis 1998, et je fini toujours par y retourner après quelques années d’oublis. Ce jeu représente un véritable classique à mes yeux, et même une expérience...

le 10 nov. 2012

6 j'aime

5