Je savais que ce film allait être étrange et dérangeant, mais ce genre de films, j’en avais déjà vu plusieurs et j’avais su les apprécier. J’avais su apprécier la volonté d’originalité, et j’avais su supporter le côté déstabilisant. Je pensais donc trouver de l’intérêt à ce film comme aux précédents, d’autant que j’avais beaucoup accroché à « Enter the voïd » et son trip halluciné. Malheureusement cette fois la sauce n’a pas pris…


Déjà la façon de filmer est assez dérangeante, la caméra n’a cesse de tourner comme un mauvais « found footage », et c’est très vite gênant. Je n’y suis pas sensible d’habitude, lorsqu’il s’agit de scènes de combat qui s’enchaînant très rapidement, elles ne m’énervent pas plus que ça (sauf si c’est abusé) mais là faut avouer c’était assez pénible.
La boite gay glauque à souhait, à ce stade c’est même plus dérangeant, c’est carrément malsain. Et avec cette façon de tourner virevoltante, un Vincent Cassel enragé et un Dupontel qui tente de le raisonner dans des scènes irréalistes, cela n’aide pas…
Le début donne clairement le ton pour ceux qui ne sauraient pas dans quoi ils s’engagent, ce sera un film sur les bas-fonds des villes et les travers de l’être humain, ce ne sera pas un film à mettre devant tout le monde.


Puis on comprend rapidement que la linéarité est inversée, on remonte le temps pour comprendre comment la situation en est arrivée là. Impossible dès lors de ne pas penser à une copie de « memento », mais pourquoi pas voyons ce qu’il propose néanmoins, puis il y a cette façon de filmer originale qui le distingue de son apparent model américain. Alors on se force un peu, et on arrive à la fameuse scène de viol dont j’avais déjà entendu parler.
Il est vrai qu’elle est forte cette scène, d’habitude les films y passent assez vite et ne s’appesantissent pas trop, mais là elle dure plusieurs minutes, plusieurs minutes de calvaire insoutenable pour la pauvre victime. J’ai regardé les Saw sans sourciller, et plein d’autres films que je n’aurais pas osé visionner dans le train, mais là même moi j’ai eu envie de détourner le regard.
Certes il y a ce côté malsain et presque provocateur du début du film, et cette scène s’y inscrit en plein dedans. Cependant, le réalisateur a justement eu l’audace de montrer ce genre de situation (qui arrive malheureusement…) sous un aspect réaliste, sans justement éviter de ne pas montrer ce qui choque la morale, et nous fait partager ce que peut être l’horrible calvaire d’une victime agressée au plus profond de son être.


Après cette scène choc, la caméra se stabilise enfin, malheureusement le film offre ensuite un intérêt réduit. Il se focalise sur le trio, le couple qui aime s’amuser et l’ex frustré qui a malgré tout conservé de bonnes relations, une espèce de ménage à trois un peu improbable dont j’ai eu un peu de mal à compati**r. J’ai bien compris le but du réalisateur, montrer ces êtres dans des moments d’insouciance, de rêves de bonheurs futurs, juste avant le drame, alors qu’ils n’ont encore aucune idée de ce qui va leur arriver. Mais ces scènes sont étirées à rallonge, y compris des jeux sensuels entre Vincent Cassel et Monica Belluci. **Ils sont certes des sex-symbols, mais à ce stade autant montrer leur corps nu, c’est plus du voyeurisme que de l’art…
Un procédé original qui présente néanmoins un résultat positif (que j’ai réalisé en lisant d’autres critiques) : celui d’apporter un apaisement après le choc, non après la guérison, mais dans les moments où le bonheur était encore présent. « Le temps détruit tout ». Mais un bonheur temporaire, comme le rappel des signes du drame inéluctable à venir…


Il y a bien une audace et une volonté d’originalité de la part de Gaspard Noé, mais celle-ci s’efface un peu trop derrière des procédés douteux un peu grossiers et tapageurs.
Il faudrait que je regarde d’avantage de ces œuvres pour avoir une meilleure appréciation de ce réalisateur et mieux comprendre sa vision.

Enlak
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le 25 août 2017

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