Des passions exacerbées, une tempête, un assassinat, un spectre, de la noblesse, des manœuvres diaboliques, du grandiose à tous les étages, une langue inimitable, pas de doute, nous sommes chez Shakespeare ! Ajoutons à cela une distribution de prestige, des décors impressionnants, des plans ciselés... il y a là de quoi passer deux heures jubilatoires en compagnie de ce que le genre humain fait de mieux en matière de grand spectacle. Le texte à lui seul est quasiment hypnotique. James Mason campe un Brutus pétri d'humanité et de noblesse, la brève apparition de Deborah Kerr le dote d'une épaisseur sentimentale que Racine n'aurait pas désavouée, Marlon Brando se cambre crânement dans la toge de Marc Antoine, sur le fil du rasoir entre sa volonté de survie et son désir de pouvoir, et tout est à l'envi. Je manque peut-être d'objectivité sur cette affaire, car j'ai toujours eu une grosse faiblesse pour les péplums. Et les vers classiques, dans n'importe quelle langue que je connaisse, me sont un baume. Sans compter que mon œil est sensible aux contrastes et aux compositions du noir et blanc. Et que je fonds toujours pour un beau drapé. Il faut peut-être partager ces inclinations avec moi pour apprécier cette débauche d'images, visuelles aussi bien que littéraires, mais j'aurais quand même tendance à trouver qu'on tient là un cocktail vénéneux, aux charmes duquel il est facile de succomber...