Voir « Jusqu’au bout du rêve », c’est rêver d’en voir le bout.

Critique proposée pour les 16èmes de finale de la coupe Sens Critique organisée par guyness.

« Jusqu’au bout du rêve » fait partie de ces œuvres qui jouissent d’une grande popularité dans leur pays d’origine, mais qui peine à s’exporter à l’étranger. Et pour cause, quelques minutes suffisent amplement à identifier sa nationalité, tant il apparaît solidement ancré dans la culture américaine, pas pour le meilleur malheureusement, mais surtout pour le pire. Il possède absolument tous les tics spécifiques aux mauvaises productions de l’Oncle Sam. On retrouve évidemment le goût prononcé des Ricains pour les fins originales dont en ressort tout chamboulé … La larme à l’œil … ou pas.

C’est ainsi que ce film est plutôt resté confidentiel dans notre chère France accumulant à peine plus de 100 notes sur notre site favori. On remarquera tout de même sa présence dans le livre des « 1001 films à voir avant de mourir », qui tente d’effectuer un panorama du cinéma mondial, sans pour autant que ce soit un gage de qualité.
Ne vous inquiétez surtout pas ! Vous pourrez mourir en paix sans l’avoir vu. J’irais même jusqu'à dire qu’on ne s’en porte pas plus mal.

« Jusqu’au bout du rêve » est un titre que l’on imagine tout droit sorti d’un film d’animation naïf à souhait, à la morale parfois douteuse, et dont la vision peut considérablement évoluer en fonction de l’âge à laquelle on le juge. Le titre s’avère être en parfaite adéquation avec son ton, sa qualité et son contenu. C’est déjà un point positif, me direz-vous.

L’œuvre en question est une petite comédie, sorte de conte fantastique moderne à la Capra teintée d’un léger drame familial, dans laquelle on retrouve une « starlette » de l’époque : Kevin Costner. Ca commence sur les chapeaux de roues avec un générique qui contient les musiques les plus patriotiques que l’on puisse trouver. Elles ne dépareilleraient sûrement pas dans certaines réalisations de Spielberg comme « Il faut Sauver le Soldat Ryan ».

Commençons par exposer le postulat de départ :

Il était une fois, un citoyen lambda de l’Amérique rurale, appelé Ray Kinsella, qui vivait une petite vie paisible en couple avec sa femme, toute docile, et leur adorable fille unique.

Le prologue nous résume brièvement par des photographies accompagnées d’une douce voix-off, la vie de Ray jusqu’à l’achat d’une grande propriété de l’Iowa, sa ferme.

Ce train de vie tranquille est chamboulé lorsque le pater familias, alors dans un de ses innombrables champs de maïs, croit entendre une voix surnaturelle, plutôt kitsch au passage, lui murmurer à l’oreille :

« Siiiiiiiii tu le bâtiiiis, illlll viendra sûremeeeeeeeennnnnnnnt ».

En dépit de l’opposition de sa famille, il va suivre aveuglément, et si vous voulez mon avis, assez connement cette voix, quitte à se mettre en danger économiquement parlant.

Persuadé que cet événement est une main tendue pour accomplir ses rêves alors qu’il pense que son propre père, lui, ne les a jamais accomplis, il va donc sacrifier sa récolte pour construire dans sa propriété un terrain du plus américain des sports : le baseball.

Jusque là, le film nous fait tellement gober n’importe quoi que je remercie le Ciel d’avoir épargné cela à bon nombre de mes compatriotes français.

Et le rêve continue !

Les nouvelles manifestations de cette voix mystérieuse lui énoncent des indices toujours plus énigmatiques. Mais où veut-elle en venir ?

Voilà un concept très saugrenu, je l’admets. Mais est-ce que le charme opère ? Pendant tout le visionnage, j’ai ri du pathétisme constant et de l’inefficacité de chaque scène à convaincre le spectateur de la crédibilité et de l’utilité de sa démarche.

Je dois vous avouer que j’ai beaucoup de mal à assimiler un film comme celui-ci au genre du cinéma comme je l’imagine, c'est-à-dire un art à part entière. Tout porte à croire que cette réalisation est un téléfilm mignonnet et sans prétention, qui a été multi-diffusé sur les grandes chaînes pour redonner le moral en temps de fête comme ceux qui entretiennent la magie de noël.

Il en possède toutes les caractéristiques et défauts qui peuvent parfois avoir un certain charme :
- Des personnages aux traits horriblement forcés quand ceux-ci ne sont ni vides ni fades.
- Une pléiade de bons sentiments qui émerveillent étant enfant, qui peuvent s’avérer rassurant et détendant pour certains, mais qui donnent sans cesse un côté irréaliste insupportable.
- Une accumulation de situations soit abracadabrantesques, soit ultra-prévisibles.
- L'utilisation de ficelles scénaristiques ridicules déjà vues des centaines voir des milliers de fois.
- Des agressions sonores permanentes avec ce fond musical usant à l’extrême de gros coups de violons pour émouvoir … ou pas. Cela représente un fardeau que je ne souhaite à personne.

Un peu excessif ces arguments mais ce n’est que mon humble avis de spectateurs agacé par ce que je viens de voir.

« Jusqu’au bout du rêve » constitue donc pour moi un bon gros nanar du cinéma, mais un excellent téléfilm où la mayonnaise prend … ou pas. On peut effectivement se laisser envoûter par cette expérience, pleine de légèreté, ayant le mérite de redonner le moral si on sait exactement ce à quoi on s’attend, quand on s'y plonge.

Mais attention, ne cacheait-t-il pas une profondeur insoupçonnée ? Phil Alden Robinson ne livrerait-il pas avec justesse une réflexion sur l’aliénation moderne ?

A chaque événement, nous nous interrogerons sur la santé mentale de Ray. Puis vient l’inquiétude quand sa folie destructrice déteint peu à peu sur son entourage. Ce déballage sans queue ni tête ne serait-il pas finalement qu’un prétexte pour représenter une Amérique en proie au doute face à la menace terroriste.

Oh, que je suis navré. Je crois que je suis allé encore plus loin que le bout, puisqu’au bout du rêve, il n’y avait rien d’autre que du vide.

Sur ce, j’espère que cette critique vous a plu … ou pas. Si vous pensez toujours que les enfants naissent dans les choux et sont transportés en cigogne : ce film est définitivement fait pour vous !
TheStalker

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