Présenté en hors-compétition au dernier festival de Cannes, La Belle Époque marque la seconde réalisation du trublion Nicolas Bedos. Exercice souvent délicat pour un jeune cinéaste, le futur réalisateur d’OSS 117 confirme son talent de conteur en signant une histoire d’amour aussi nostalgique que romanesque.
Comme tout bon « fils de », Nicolas Bedos c’est longtemps fait connaître au travers de ses diverses frasques, cultivant l’image du bobo parisien, tendance fêtard et accessoirement grande-gueule. Il n’a pas non plus manquer de diviser, se plaisant à jouer avec son côté provoque, multipliant des prises de position choc. De quoi entretenir son lot de détracteurs et d’admirateurs. Car le bonhomme a du talent en plus d’être un touche à tout. Humoriste, metteur en scène, comédien, chroniqueur, metteur en scène… Ne manquait plus que cinéaste à son arc. Chose faite avec Monsieur et Madame Adelman en 2017, qui avait reçu un accueil plutôt favorable.
Victor est un dinosaure. Une machine à remonter le temps à l’ère de la modernité et du tout numérique. Dessinateur de son état, il se plait encore à gribouiller sur du papier, du vrai. De quoi énerver sa femme qui s’émerveille de la nouveauté autant qu’elle se fatigue de lui. Nostalgique d’un amour perdu, il se voit proposer une attraction d’un nouveau genre par un ami de son fils qui lui permet de revivre l’époque de son choix. Victor choisit alors de retourner en 1974 pour ranimer la semaine la plus marquante de sa vie : celle où il rencontra le grand amour.
Comme ne l’aurait guère renié la grande Odile Deray, l’effet Cannes a bel et bien frappé tant le succès du second film de Nicolas Bedos a été souligné à grands coups de standing ovation. Car il y a du cinéma dans cette Belle Époque, une volonté appliquée de Septième art qui suinte par tous les pores de la pellicule. Mise en scène appliquée, direction artistique soignée, Bedos cinéaste est synonyme de Bedos sérieux. De quoi passer le cap du second long-métrage avec plus de panache que son meilleur ennemi Beigbeder.
La plus grande arme de Nicolas Bedos restera toujours sa plume. Habile, acerbe, capable d’envolées dont seuls quelque uns ont le secret. Un talent de conteur inné qui passe dans des dialogues ciselés, décortiquant avec panache les émois d’une vie amoureuse naissante ou sur le déclin. Comme souvent chez lui cet amour est beau, exigeant, consumant, violent. Difficile de ne pas y voir un certain miroir de sa vie, de sa relation avec sa muse Doria Tillier, rayonnante, qu’il filme comme la plus belle créature que la Terre ait jamais portée. L’autre force du film réside ici, dans ce casting, que Bedos dirige d’une main de maître. Des seconds rôles (Canet, Arditi) aux principaux (Auteuil et Ardant aussi impliqués que sublimes), tout se beau linge insuffle une force supplémentaire au film qui jongle constamment entre les époques. Passé et présent se confondent dans un style romanesque réjouissant. Du cinéma français comme on l’aime en somme.
Générique de fin : Avec La Belle Époque, Bedos le sale gosse s’est mué en Bedos le cinéaste à suivre. Maitrisant son film de bout en bout, le réalisateur fait preuve d’une maturité artistique que l’on ne lui soupçonnait pas si tôt. Généreux, rythmé, le film oscille entre le rire et les larmes, se dégustant avec le sourire comme l’une des ses chroniques mythomanes. Un succès parachevé par un casting au diapason qui fait plonger le spectateur dans ces jours de 74 avec délice.
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