Bon, je viens donc de m'infliger la Loi du Marché, et comme beaucoup apparemment, j'ai un peu la nausée.
Pendant 1h30 qui en parait 12, on y suit donc la vie de Thierry, grutier au chômage et père cinquantenaire d'un ado lourdement handicapé (c'est sévère, mais coup de bol, son épouse est assez jolie et à l'air sympa, puisqu'elle ne l'a ps encore plaqué...) dans ses tentatives de retour à l'emploi d'abord, puis dans son passionnant nouveau job de vigile en supermarché.
Dans son chemin de croix de français (très, trop...) moyen, il croisera en vrac et dans le désordre :
- des fonctionnaires de Pole Emploi déconnectés du réel
- des syndicalistes auto-intrumentalisés
- des banquiers qui ne pensent qu'au fric
- des employés soumis
- des chômeurs assommés
- des acheteurs cupides
bref une jolie collection de caricatures, tous esclaves (consentants...) du Système (parce qu'avec un grand S, ça fait mieux).
A la fin, ATTENTION SPOILER Thierry re-deviendra lui-même un rouage -soumis et désabusé, mais faisant son boulot de rouage quand même (ben oui, il n'a pas, mais alors pas du tout, même pas en rêve, le choix, voyez-vous, parce qu'il est trop vieux, trop peu instruit, trop peu qualifié, et puis dépressif aussi sans doute) de ce même Système FIN DU SPOILER :D
Le casting est 100% non professionnel mais fait bien le job. A noter le 1er rôle, un certain Vincent Lindon, qui joue à la perfection un Droopy humain. Il parait même qu'il aurait eu un prix d'interprétation à Cannes pour ça.
Côté effets spéciaux, c'est limité, à part peut-être les plans de dingues des caméras de supermarché, ou la constance des expressions des acteurs (y a peut-être un nouveau genre de motion capture, mais j'ai un doute...). On se demande donc où est passé le budget de 1,2 M€, sérieux ?
A part ça, que propose la Loi du Marché :
- de l'empathie : non
- des idées : non
- un projet : non
- de l'émotion, si peu
- un rêve : encore moins
Ce que propose ce film, c'est l'équivalent avilissant pour le cinéma social de ce que sont les petits films d'horreur au cinéma de genre, où on y remplacera simplement les décapitations, démembrements et autres énucléations par les petites humiliations et médiocrités du quotidien. Au final, le résultat est le même :
- on a un peu la gerbe
- on s'ennuie ferme
- on n'en garde rien.
C'est un peu la honte d'arriver à ça avec un sujet et des acteurs pareils (dont je me moquais gentiment plus haut...). C'est encore pire d'imaginer que ce film puisse avoir une quelconque portée au-delà du cercle des critiques professionnels. Plus grave, je crois que ce truc est profondément néfaste pour les (futurs) chômeurs en mettant en scène tant de médiocrité désespérante.
Considérons donc que c'est un film réservé aux actifs éduqués et financièrement confortables, qui y trouveront un peu d'exotisme et de dépaysement au cas où la dureté sèche de nos sociétés du début du XXIème siècle leur aurait vaguement échappé.
Pardon, mais vraiment :
- le cinéma social, ce n'est pas ça
- le cinéma tout court, ce n'est pas ça
- la vie, ce n'est pas ça.