Hercule Branagh, ou Le Crime de l'Orient-Express avec un seul personnage

Dans la plupart des versions filmiques, téléfilmiques et sérielles de Hercule Poirot, le détective était âgé, en quête d’une retraite paisible toujours interrompue par quelque crime sordide, et si potelé que sa seule force venait de ses cellules grises (dont il était fort fier). En interprétant le personnage après Finney, Ustinov et Suchet, le réalisateur Kenneth Branagh lui fait subir un petit lifting dans l’air du temps, conservant sa moustache grandiloquente au grotesque, mais lui conférant une minceur plus athlétique et une vivacité tant d’esprit que de corps… et une histoire d’amour évoquée au passé. Bref, Branagh s’efforce d’injecter une dose de pathos dans des histoires habituellement théâtrales, de ménager d’emblée une suite (à quoi bon sinon ces références totalement gratuites dans la dramaturgie du film à une histoire d’amour qui n’existe nulle part ailleurs ?), d’imposer son propre physique dans la culture populaire plutôt que d’assimiler celui de son personnage. On peut ainsi être surpris même sans être le plus ardent défenseur de la « fidélité à la source » de la place prise par le réalisateur-acteur dans un processus d’adaptation.


Surtout quand l’action permise par la forme de Poirot se limite à monter sur un train sans trop de raison et à l’addition d’une course-poursuite au moins aussi arbitraire. Le rajeunissement permet d’explorer un Poirot célèbre mais pas viellissant, plus dandy que vacancier excentrique, imbu de lui-même mais ayant encore quelque chose à prouver, du coup (et c’est dommage) plus sérieux qu’espiègle… et de mettre en scène Branagh lui-même en vieux beau mélancolique, en figure admirable et admirablement pathétique, en vrai héros en somme plutôt qu’en détective rigide, quitte à ne pas parvenir à trouver de vraie justification dramatique à ces transformations.


La suite de ma critique est disponible ici : http://vonguru.fr/longform/le-crime-de-lorient-express-critique-a-six-mains/

XipeTotec
4
Écrit par

Créée

le 3 janv. 2018

Critique lue 286 fois

XipeTotec

Écrit par

Critique lue 286 fois

D'autres avis sur Le Crime de l'Orient-Express

Le Crime de l'Orient-Express
Behind_the_Mask
7

Un pour douze, douze pour un

Ah ça, c'est sûr, en 1934, il fallait plus qu'un bug d'un poste de contrôle SNCF ou une grève cgtiste pour perturber le trafic ferroviaire ! C'est que c'était mieux avant... Comme d'hab' ma pauv'...

le 14 déc. 2017

60 j'aime

21

Le Crime de l'Orient-Express
Tonto
8

"Il y avait le bien. Il y avait le mal. Et maintenant, il y a vous."

Alors qu’il fait du tourisme à Istanbul, le détective Hercule Poirot (Kenneth Branagh) reçoit un télégramme l’appelant d’urgence en Angleterre. Il embarque alors sur le célèbre train de...

le 21 déc. 2017

32 j'aime

36

Le Crime de l'Orient-Express
-Marc-
5

Le beau rôle

Le roman d'Agatha Christie eut un succès qui ne s'est jamais démenti. Le film de Sidney Lumet reste une référence incontournable. Quand on veut faire une nouvelle version d'une telle oeuvre, il faut...

le 16 oct. 2019

27 j'aime

17

Du même critique

Le Retour de Mary Poppins
XipeTotec
4

Vive le capital !

Le Retour de Mary Poppins est oubliable, ou pis qu'oubliable : on aimerait l'oublier, et on sait que certaines scènes nous resteront en travers de la gorge, comme cette suffragette absolument ravie...

le 23 déc. 2018

5 j'aime

5

Illang : La Brigade des loups
XipeTotec
4

Bien pire qu'un vrai remake scène par scène

Parmi les trois « Netflix Originals » du mois d’octobre, Apostle était entièrement original, le scénario d’Un 22 juillet était écrit par Paul Greengrass, mais s’appuyait sur un livre de non-fiction...

le 1 nov. 2018

5 j'aime

Escort Boys
XipeTotec
8

Critique de Escort Boys par XipeTotec

Quelle étonnante surprise que cette série que j'aurais aisément pu croire états-unienne sans la langue et quelques actrices connues dans des rôles discrets, tant la Camargue rurale y est filmée comme...

le 26 déc. 2023

4 j'aime