J’aime assez ces films qui se trouvent à la frontière du western ; souvent situés dans l’ouest américain encore campagnard dans les années 50 à 70, ils mettent en scène des cow-boys dans un monde fait de goudron et d’acier qui n’est plus celui qu’ils connaissent et maîtrisent. Ils ont leurs codes et particularités récurrentes, mais utilisent le plus souvent leur époque charnière (la fin d’un mode de vie) pour servir les histoires qu’ils content.


C’est dans ce cadre que se place « Hud », film de 1963 réalisé par Martin Ritt mettant en scène Paul Newman dans le rôle-titre, un vieillissant Melvyn Douglas dans celui de son père et Patricia Neal dans le rôle féminin principal, ces deux derniers remportant d'ailleurs des Oscars.


Dans une petite ville de l’ouest, Hud Bannon est un coureur de jupons notoire, qui passe ses soirées en ville à boire et se bagarrer avant de terminer la nuit, bien souvent, avec des femmes mariées. Cela au grand dam de son père, Homer, propriétaire du ranch Bannon à l’excellente réputation, qui s’est attaché à faire du nom Bannon un symbole de probité et d’intégrité.
Le jeune Lonnie, troisième homme du ranch, est le petit-fils d’Homer et le neveu de Hud et se trouve tiraillé entre l’admiration qu’il éprouve pour son oncle, son côté charmeur irrésistible et détaché, et les valeurs que lui inculque son grand-père, qui se charge de son éducation.


Prenant comme contexte une difficulté financière qui fait traverser une période de crise à la famille, le film s’attache à examiner les rapports filiaux qui existent entre les trois personnages, avec, comme enjeu central, le poids de la transmission et celui de l’inné. Hud accuse son père de l’avoir rendu froid et indifférent tandis que celui-ci se défend de toute responsabilité, arguant que son fils a toujours été ainsi. Le film est vécu, pour la plus grande partie, à travers des yeux de Lonnie, témoin des disputes entre deux générations qui s’opposent, Homer représentant l’antique mode de vie de l’ouest sauvage, qui disparaît, et Hud, l’homme moderne, désinvolte et sans charactère.


Si le traitement du sujet est relativement satisfaisant, sa banalité ne permet pas à « Hud » de véritablement se distinguer. Le film demeure très peu original, et trouve finalement plus d’intérêt dans les à-côtés qu’il propose : une atmosphère, en particulier graphique, réussie, et de bons acteurs.


Proposant une photographie en noir et blanc souvent très exposée, presque aveuglante, le film dépeint une petite ville déserte de l’ouest en fin de vie – qui évoque un univers à la « Last Picture Show » de Bogdanovich – et reprend les éléments caractéristiques du genre : cow-boys, chevauchées, pick-ups, rodéos et traditions rurales.


Le cast d’ensemble est de bon niveau. Le jeune acteur incarnant Lonnie est malheureusement assez peu à son aise et ses quelques tirades sont débitées un brin laborieusement. Paul Newman et Patricia Neal, en revanche, rayonnent, disposant de quelques excellentes scènes, en particulier lorsqu’ils se trouvent opposés. Melvyn Douglas, qui n’étais pas spécialement inoubliable dans les années 30, semble s’être trouvé un peu de talent sur le tard, et s’en tire très honorablement dans le rôle du père…


« Hud » est un film intéressant, qui se regarde sans ennui, mais qui ne dispose d’aucune réelle fulgurance. Bien construit, beau et bien joué, le film se perd dans les méandres d’une étude sur la filiation un peu trop forcée, qui paraît donc artificielle et se fait au dépend de l’histoire.

Aramis
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le 2 oct. 2017

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