J'ai toujours éprouvé une forme de fascination à l'écoute des palabres politiques. Il y a de beaux mots, de jolies tournures de phrases, des expressions fracassantes. Ça claque, ça gifle. Une simple réforme dont on peine à comprendre les tenants et aboutissants se transforme dans la bouche d’une personnalité bien apprêtée en une prétendue offense directe aux fondations de notre civilisation. Et à sa manière, en regardant Le Président, j’ai un peu retrouvé toutes ces choses. On comprend pas forcément tout ce qu’il s'y passe. Parfois notre esprit divague, car des sonorités bien agencées nous ont véhiculées des images curieusement distantes. Puis, soudainement rattrapé par un changement dans la tonalité du tribun, on essaie péniblement de rattacher les wagons. Et à nouveau on se relâche, s’amusant, s’esclaffant même à la vision des exclamations outrées des personnes incriminées, de la levée quasi militaire de toute une rangée, de la mine déconfite du feu acclamé. On le sait au fond de nous que tout ça n’est que du théâtre. Que derrière le voile des mots, il ne s’agit au final que d’égos froissés, d’ambitions malmenées, de vocations écharpées. Le ridicule est palpable. Mais on s’en délecte. On se délecte de ce vieux grisonnant et bedonnant, à la verve acérée, qui semble avoir déjà tout prévu, tout calculé. Parce que contrairement au tumulte incessant de la populace environnante, avide de nouveaux sommets à conquérir, lui, il a déjà eu tout le loisir d’apprécier l’horizon qu’offrent ces derniers. Un horizon fait de traîtrises, d’amitiés faussées, d’idéaux malmenés. Cette sagesse durement conquise se ressent jusqu’à dans son propre rapport à la mort. Et il en joue, comme un gosse. Multipliant les pieds de nez à ceux qui n’attendent que son inscription dans la prochaine nécrologie pour parfaire leur carrière de petits délits.


Et nous, bien loin de ce gratin mesquin, on se met à songer, au bout de presque deux heures de visionnage, que tout de même, Gabin dans un parlement, ça donne presque envie d’aimer la politique.



Je crois avoir été l'un des hommes les plus détesté de son époque, ce fût longtemps mon chagrin, c'est aujourd'hui mon orgueil.



Ptain ça claque.

Gyaran
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le 31 août 2020

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Gyaran

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