Running man
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Yves Boisset est un réalisateur français qui a des burnes et qui a su s'extraire d'un certain formalisme à la française en prenant des risques, en renâclant ailleurs que les codes préconçus du Septième Art hexagonal. Bien sûr, il ne s'agit aucunement d'une critique gratuite et malheureusement trop répandue du cinéma national qui a son identité propre. Seulement, étant partisan acharné de l'audace et de l'innovation, c'est indispensable de se diversifier. Voilà pourquoi j'ai une sympathie toute particulière pour Yves Boisset dont je découvre enfin Le Prix du Danger. Adaptation du roman éponyme, sa réputation n'est plus à faire, certains le considérant même comme un film culte.
Il est vrai qu'à bien des égards, le long-métrage a de quoi séduire. Bien en avance sur son temps, il décrit une société qui a perdu toute notion élémentaire d'éthique, en mettant en son centre, il est vrai, une vérité dérangeante. L'Homme reste un animal et les pulsions de haine et de violence sont ancrées en lui et le seront toujours. Non sans s'éloigner de "American Nightmare", des décisionnaires ont eu la glorieuse idée d'exorciser les démons intérieurs de chacun. En l'occurrence ici, les médias les retranscrivent directement dans un gigantesque reality-show douteux où des volontaires acceptent de défier la mort pour la modique somme de 1 million de dollars. Pourchassés par des tueurs, eux aussi volontaires, ils doivent parvenir à rester vivants au bout de ces 4h pour espérer toucher le précieux magot. Le Prix du Danger ratisse donc large entre critique cinglante de la nature humaine se nourrissant des mauvaises nouvelles, du malheur d'autrui et passionnée intérieurement par la mort. Ne dit-on pas après tout qu'un journalisme plein de bonnes nouvelles marche beaucoup moins que des infos sensationnalistes qui procurent pour certains leur petite dose d'adrénaline.
Les gens sont fascinés par une animosité qu'ils condamnent et sur ce point Yves Boisset tape juste. La vérité est amère, émotionnellement répulsive mais moralement vraie. Nous ne vivons pas dans le monde des bisounours et ça il serait temps de le réaliser un jour. Au-delà de ça entre le grand-guignolesque de la TV réalité qui s'est depuis longtemps engouffrée dans le ridicule et la classique formule "Panem et circenses", le portrait civilisationnel est d'un bon rendu. Il est en revanche dommage que Le Prix du Danger ait opté pour des facilités parfois lourdes qui détruisent in fine son potentiel. Entre un certain ton moralisateur et quelques clichés douteux (pitié que l'on arrête avec la femme qui pleure et qui est épargnée), nous sommes désagréablement surpris par un fond beaucoup moins noir que ce que nous attendions.
En résulte tout de même un final très bien amené où c'est là que nous prenons compte de l'envers du décor médiatique où corruption et manipulation des masses ne sont plus un secret. Mention à un casting composé d'un Gérard Lanvin correct, d'un Michel Piccoli délicieusement extravagant, une très sexy Marie-France Pisier et bien sûr l'impressionnante gueule de Bruno Crémer. Le Prix du Danger est donc un honnête et intelligent divertissement riche de tensions et pesant sur le sort de son candidat que l'on ressent être vraiment en danger. On aurait pu s'attendre à bien mieux mais le résultat est tout ce qu'il y a de plus recommandable. C'est déjà pas si mal que ça !
Créée
le 10 juin 2021
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