2018 sera l'année où le cinéma a tenté de briser les multiples codes du western. Deux films viennent éclairer ce constat : le sublime Hostiles sorti en début d'année et inexplicablement ignoré à la cérémonie des Oscars et ce Sisters Brothers signé Jacques Audiard. Là où Hostiles était une petite révolution d'un point de vue scénaristique et thématique, The Sisters Brothers se distingue de la majorité des westerns par son ton, son rythme, ses choix singuliers et radicaux, son attention portée à la mise en scène et aux personnages. Qu'un Français s'attaque au genre codifié et tellement américain du western, peut créer des doutes sur la réussite du projet. Or, Audiard signe un grand film, qui résonne bien au-delà du western.
Tout d'abord, le réalisateur français simplifie au maximum son histoire. Cependant, elle n'est pas dénuée d'intérêt. Certes, il s'agit d'une poursuite de l'Oregon à la Californie qui consiste essentiellement à retrouver et assassiner un scientifique qui cache une formule secrète. Mais le film parle de multiples sujets transversaux, qui concernent aussi bien les frères Sisters que leurs homologues, Morris et Warm. Audiard filme une Amérique en pleine révolution industrielle, dressant un portrait modeste mais éblouissant des contrastes entre villes et villages. En effet, le spectateur est aussi surpris que les deux frères lorsqu'apparait à l'écran une ville comme San Francisco. Audiard capte avec brio le bruit oppressant de ces rues bondées, en opposition au calme troublant dans les villages et les plaines. Il adopte le rythme des habitants de la ville, filmant avec une rapidité extrême le chemin des deux frères. Tout est plus rapide : leurs pas, leurs expressions faciales, leurs réactions, leurs dialogues. Audiard filme aussi remarquablement la foule, Eli et Charlie étant complètement perdus dans une immense mare d'individus, où le spectateur peine à les discerner, au risque de perdre le fil.
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