Ça devrait plaire aux fans de S.Coppola, néanmoins...

J'ai un problème avec le cinéma de Sofia Coppola. Autant je trouve les thématiques de ses films souvent intéressantes, autant je leur reconnait une touche esthétique propre et appréciable, autant j'ai beaucoup de mal avec l'exécution et la façon dont ces thématiques sont traitées. Parfois j'ai l'impression qu'il manque quelque chose, d'autres que la fin arrive trop vite, souvent que les personnages sont trop prudes et intériorisent à outrance leurs émotions, quand ils ne manquent pas un peu de développement. J'espérais avoir un ressenti différent avec Les Proies, mais au contraire, c'est un peu de chacun d'entre eux que ce film m'a inspiré, malgré la présence de trois actrices talentueuses et qui me tapent dans l’œil à chacune de leurs apparitions (Kidman, Dunst et Fanning).


L'histoire traite donc d'un pensionnat de jeunes filles qui accueille en son sein un soldat yankee blessé et dont l'arrivée va bouleverser la vie et le quotidien. Le plus notable, c'est que si le film instaure une bonne ambiance et une certaine tension notamment grâce à une photo et une esthétique léchée, le climax n'en profite pas et tombe terriblement à plat.


J'entends par là bien sur la scène du dîner, où il doit se passer en tout entre 5 et 10 minutes entre l'idée de l'empoisonnement et la fin du film.


Je ne me suis pas senti touché comme je l'aurais du par cette scène, je n'ai rien ressenti, et je me suis simplement dit "C'est tout, c'est terminé ?" avant de ressortir de la salle avec l'impression d'un film qui avait l'effort de poser ses fondations mais sans les exploiter correctement. Vu que je n'arrivai pas a totalement comprendre les raisons de ce ressenti mais que le film m'avait intéressé, j'ai eu envie de me pencher sur l'original, et de voir s'il tombait dans le même travers ou si c'était une caractéristique de cette adaptation. Avec une certaine appréhension, car je dois bien avouer que les films pré-années 80, ce n'est pas forcément habituellement ma tasse de thé. Je sais que nous ne sommes pas là pour parler de ce premier film, mais son visionnage m'a permis de comprendre d'où venait mon impression et les manques du film de Coppola.


Tout d'abord, les personnages y sont beaucoup plus affirmés et travaillés, simplement mieux écrits et plus en nuances, notamment celui du Caporal. On nous laisse moins dans le doute concernant son caractère profond tout en gardant une certaine subtilité dans l'interprétation pour néanmoins laisser planer une interrogation. Du coup, on comprend mieux ses décisions et ses réactions, et c'est aussi le cas du personnage de Nicole Kidman, qui est exagérément guindé dans le remake. Il en va de même du personnage de Carol, qui est autrement plus subversif que celui joué par Elle Fanning.


Il est d'ailleurs amusant de constater qu'un film sorti en 1971 est plus subversif que son remake de 2017, ou tout est davantage propre, lisse et prude. Certaines thématiques importantes qui sont présentes dans le premier sont ici totalement absentes (tout le contexte historique, le racisme, l'inceste notamment).


En fait, les personnages sont simplement plus cohérents, les situations mieux amenées, donc on est davantage pris dedans et le climax est du coup bien plus intense. Je pense notamment à la scène de sexe "torride" entre Colin Farrell et Kirsten Dunst, absente de l'original et qui m'avait fait l'effet d'arriver comme un cheveu sur la soupe, d'être un peu artificielle, mal placée, juste après la violente crise de colère du Caporal. Il y a juste un point qui est commun aux deux films et auquel j'ai du mal a adhérer :


Edwina qui reste de glace et sans rien dire ni même chercher à comprendre après l'empoisonnement du Caporal, dont elle déclare être amoureuse et vouloir partir avec 5 minutes avant.


En résumé, on échange les points que je viens d'évoquer contre une esthétique et une touche plus "Coppoléenne". Le film n'est pas une mauvaise adaptation, à vous de voir ce que vous recherchez davantage. Personnellement, j'opte pour le film de 1971.

Vonsid
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le 26 août 2017

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Vonsid

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