Après le trip sensoriel d'Enter The Void, Gaspar Noe nous revient sur grand écran avec un drame porno-sentimentale. Peu productif sur grand écran ( 4 longs en 17 ans) , l'homme ne reste pas moins actif pour le 7e art en multipliant les projets sur différents formats.

Ainsi entre chaque long, l'auteur réalise des clips tels que Love In Motion ( annonçant clairement l'esthétique d'Enter The Void), des spots de prévention (Sodomites, court-métrage pour la campagne de sensibilisation du ministère de la Santé ) et œuvre aussi en tant que producteur (La Bouche de Jean-Pierre de Lucile Hadzihalilovic). Des projets divers et variés lui permettant d'explorer différentes thématiques et techniques.


Comme ce fut le cas pour Irréversible, Love a créé une polémique. Dans un premier temps via les affiches promo du film et ensuite avec le changement de classification à la demande d'une association d'extrême-droite.

La question n'est pas de se demander s'il faut interdire sévèrement un film contenant des actes sexuels explicites alors que l'on retrouve de la nudité partout pour différentes raisons ( magazines peoples, télé-réalité, publicité, ...). La seule interrogation est de savoir si Love n'est qu'un simple porno chic en 3D ou une histoire romantique pour adulte.


À l'instar de ses précédents longs, nous suivons les tribulations d'un personnage masculin et, à l'exception d'Irreversible, une voix off permettra de nous livrer le fond de ses pensées. Nous vivons ainsi le récit à travers ses souvenirs.

Ces derniers arrivant de manières désordonnées, il est donc nécessaire de se fixer des repères chronologiques, car l'auteur n'en fournit aucun. Bien que déroutant, cette structure narrative éclatée est logique, car en adéquation avec le point de vue adopté.

En effet, lorsque nous nous remémorons un événement, nul besoin de le dater précisément ou que cela soit un moment de vie "complet". Nous focalisons sur l'aspect qui nous intéresse et nous débarrassons de toute la fioriture.

Le fait de s'immiscer dans l'esprit d'une personne, permet des traitements visuels moins réalistes, mais retranscrivant les émotions de telles ou telles situations. Une déformation de la réalité qui peut être justifiée par une extrapolation fait par le protagoniste. Certains choix stylistiques donnent un aspect irréel aux scènes.


L'absence de repères temporels ainsi que les faibles interactions avec le monde extérieur donnent l'impression de vivre dans un micro-système régis par les relations sentimentales et sexuelles. Ainsi, à aucun moment, nous n'avons de discutions autour du travail, des événements sociaux ou historiques. Seuls les sentiments et l'art sont matières à alimenter les dialogues.

Le problème principal réside dans la banalité de ces instants. Les actes sexuels sont classiques jusque dans les fantasmes accomplis ( threesome, boites échangistes...). D'un point de vu sentimental même constat, Murphy ressasse son amour perdu suite à un écart de conduite. Il y a peu d'évolution concernant la psychologie des personnages ou l'enjeu des récits.


Pour autant, Gaspar Noé réussis a capter l'attention si l'on accepte l'univers de l'auteur. En effet, l'ensemble du récit est rempli de références au réalisateur. Une des ex de Murphy s'appelle Lucile, dans sa chambre se retrouve la maquette de l'hôtel Love, le protagoniste cache sa drogue dans une VHS de Seul Contre Tous, etc. Ces détails permettent de brouiller la frontière entre la fiction et un possible lien avec le vécu du réalisateur.

Outre ces éléments, nous retrouvons différents "tics" de mise en scène présents dans ses précédents longs : le clignement des yeux, des plans fixes sur une lumière, les déambulations des personnages filmés de dos, etc.


Au final, même si récit est plutôt convenu, les thématiques abordées et le traitement effectué sont suffisamment maîtrisés pour nous captiver. L'œuvre ne fera pas l'unanimité, car il dépend de l'affinité que l'on entretien avec l'univers, parfois hermétique, de Gaspar Noe et sa propension à créer des œuvres bousculant les arcs narratifs traditionnels ainsi que son refus à édulcorer son propos quitte à s'attirer les foudres d'une partie du public.

En attendant son prochain projet, c'est avec curiosité que sera suivie sa première incursion dans le genre horrifique via sa participation a l'anthologie Theatre Bizarre 2: The Grand Guignol.

tzamety
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le 23 août 2015

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