C’est le film dont tout le monde parle sur les réseaux actuellement. Sorti la semaine dernière sur Netflix, Marriage Story réunit Scarlett Johansson et Adam Driver devant la caméra de Noah Baumbach dans un drame familial qui fait une entrée soudaine dans la course aux récompenses, qui vient de débuter.


Quand le spectateur lance le film, il sait que celui-ci va parler d’un divorce. Pourtant, les premières minutes consistent en un portrait, en voix off, de chacun des deux membres du couple, récité par l’autre. On découvre alors deux personnes complices, racontant ce qui a façonné leur union, ces choses du quotidien qui les ont réunions et fait avoir des sentiments l’un pour l’autre. Et, après quelques minutes de divagations romantiques, le retour à la réalité. On se retrouve dans une salle en compagnie de Nicole (Scarlett Johansson) et de Charlie (Adam Driver) qui récitaient, dans leur tête, un portrait de l’autre qu’ils avaient écrit à la demande d’un médiateur supposé les aider à renouer ensemble. Une première cassure se crée, et Marriage Story va progressivement l’agrandir au gré des procédures et des ressentiments.


La complicité entre Nicole et Charlie ne fait pas de doute, et celle-ci transparaît très bien à travers celle qui réunit également Scarlett Johansson et Adam Driver, qui s’associent très bien à l’écran. Cependant, les circonstances et les choix de vie font que cette union ne peut plus être maintenue, dans le bien commun. Ce ne sont plus deux personnes qui constituent un couple, mais une somme dissonante. Chacun vivait sa vie, puis leur rencontre a fait qu’ils pouvaient s’associer, mais le temps a fait que leurs vies sont de nouveau incompatibles. La principale différence avec avant, c’est Henry, leur fils, dont il faut s’occuper, et qui doit grandir dans ce contexte difficile. En prenant son temps, Marriage Story vient construire et détruire le mariage, mettant en lumière toute la complexité d’une vie de couple qui doit associer les intérêts personnels et les intérêts communs, souvent au risque de générer des conflits.


Le mariage est une institution, et, comme toute institution, elle est soumise à des procédures. Marriage Story vient alors rajouter, en plus des éléments liés aux sentiments et aux émotions, tout ce qui a attrait à la dimension sociale du mariage, entre sa perception de la part de l’entourage de Nicole et de Charlie, et l’intervention des personnes gérant le divorce. A ce jeu, les avocats, notamment ceux joués par Laura Dern et Ray Liotta, incarnent toute la perversité d’un système méprisant l’humain et les sentiments, transformant le tout en un jeu malsain où chacun tire la couverture à soi dans un élan d’égoïsme paradoxal, alors que chacun reproche déjà à l’autre de ne penser qu’à lui. Marriage Story parvient alors plutôt bien à créer une forme de regret et de nostalgie par rapport à ce couple qui devrait pouvoir perdurer, mais qui ne peut plus s’entendre pour des raisons tout à fait compréhensibles. C’est ce qui fait que Marriage Story ne proposera pas le moindre jugement, donnant à chacun ses raisons d’agir, d’avoir raison ou d’avoir tort, pour laisser le temps faire son oeuvre, tourner la page et repartir sur des bases saines.


Marriage Story est un film qui prend son temps, qui laisse les scènes durer, pour que les personnages s’expriment, que le spectateur ressente et comprenne les choses, pour développer une tension dramatique ou, simplement, pour mieux partager le quotidien des personnages. Il va sans dire que les performances des acteurs, notamment Scarlett Johansson, Adam Driver, mais aussi Laura Dern, apporte beaucoup au film. Peut-être que l’enthousiasme qui accompagne sa sortie me semble un brin démesuré, même si je suis content qu’un tel film trouve crédit aux yeux du public. Dans l’ensemble, Marriage Story est un film réussi, sans que celui-ci m’ait véritablement affecté à terme, hormis lors de quelques passages marquants, bien entendu. Une surprise agréable et bienvenue en cette fin d’année, qui devrait faire parler d’elle lors des futures cérémonies dédiées au cinéma.


Critique écrite pour A la rencontre du Septième Art

JKDZ29
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le 12 déc. 2019

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JKDZ29

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