L'élégance de la suggestion
A mon avis le dernier grand Chabrol, mésestimé par le public. Tout le cinéma de Claude Chabrol se résume dans ce film: mise en scène apparemment classique et élégante dans la forme,...
le 30 sept. 2012
16 j'aime
Merci pour le chocolat a l’aspect d’un conte moderne qui, derrière la farce anti-bourgeoise, revisite la figure de la sorcière ici incarnée par Isabelle Huppert, aussi envoûtante qu’insaisissable. Parce que la caméra de Chabrol refuse de faire d’elle une idole ou une figure un tant soit peu sacrée, Huppert apparaît comme une menace sourde et silencieuse qui a enfoui sa révolte sous son excès de gentillesse et ses démonstrations affectueuses souvent exagérées. Le cinéaste renverse ainsi le traitement traditionnel que le film noir ou le cinéma fantastique utilisent pour représenter la sorcière : le lieu du drame est une scène de théâtre où se joue un crescendo mortifère à mesure que les pianistes perfectionnent leur requiem, dans une même confusion entre l’intime et le public. Chabrol revisite la maison bourgeoise pour en faire l’espace du mystère, un espace cathartique dans lequel interagissent des forces à la fois érotiques et violentes, toujours humaines. En guise de potion maléfique, le chocolat, connu pour ses vertus médicales, qui se prépare à l’avance, se sert et se renverse selon les opportunités : il est le vecteur d’un endormissement tout autant qu’un accélérateur de particules qui va conduire les personnages à révéler leur identité secrète jusqu’alors insondable. Pourtant, la grande force politique du cinéma de Claude Chabrol demeure présente, notamment par son refus d’offrir à Mika une fin tragique : la chute laisse les enfants vivants, témoins de la folie destructrice de la mère, et réduit la belle Huppert à n’être qu’une ombre incapable de quitter l’épaisseur bourgeoise de son existence insipide. Merci pour le chocolat est une leçon de cinéma, à la fois cruelle et drôle, audacieuse et déconcertante de simplicité.
Créée
le 30 juin 2019
Critique lue 241 fois
1 j'aime
3 commentaires
D'autres avis sur Merci pour le chocolat
A mon avis le dernier grand Chabrol, mésestimé par le public. Tout le cinéma de Claude Chabrol se résume dans ce film: mise en scène apparemment classique et élégante dans la forme,...
le 30 sept. 2012
16 j'aime
Les Secrets derrière la porte d'entrée de nos maisons... Revu hélas avec un peu de déception en juin 2020, alors que je l'avais vénéré ma première fois; j'ajoute une info et corrige un peu en février...
Par
le 22 juin 2020
15 j'aime
10
Une image : Mika (Isabelle Huppert) fait un plaid au crochet en forme de toile d'araignée. alors qu'une intruse (Anna Mouglalis) vient menacer l'équilibre familial Une phrase : "faut sauver les...
Par
le 19 juin 2019
10 j'aime
5
Du même critique
Nous ne cessons de nous demander, deux heures durant, pour quel public Astérix et Obélix : L’Empire du Milieu a été réalisé. Trop woke pour les Gaulois, trop gaulois pour les wokes, leurs aventures...
le 1 févr. 2023
121 j'aime
9
Il est une scène dans le sixième épisode où Maeve retrouve le pull de son ami Otis et le respire tendrement ; nous, spectateurs, savons qu’il s’agit du pull d’Otis prêté quelques minutes plus tôt ;...
le 19 janv. 2019
86 j'aime
17
Ça : Chapitre 2 se heurte à trois écueils qui l’empêchent d’atteindre la puissance traumatique espérée. Le premier dommage réside dans le refus de voir ses protagonistes principaux grandir, au point...
le 11 sept. 2019
77 j'aime
14