Monos (Alejandro Landes, Colombie, 2019, 1h42)

Acclamé par la critique. Auréolé d’un bouche-à-oreille hyper positif. Certains osant même la comparaison avec ‘’Apocalypse Now’’. Autant dire que ce ‘’Monos’’ se présente comme une œuvre des plus alléchantes. Le postulat de départ est de plus simple et efficace : dans un futur proche, alors qu’une guerre fait rage, une unité de jeunes soldats, livrée à elle-même quelque part dans les valons colombiens. Et bien pourquoi pas, ça s’annonçait bien !


‘’Monos’’ c’est le genre de film où dès les premières minutes la réalisation s’exclame ''z’avez vu mes belles images ? Et bien profitez, parce que j’aurais rien d'autre à vous proposer pendant l’heure et demi qui reste’’. Et en effet, ce film c’est 1h42 de vide intégrale. Pas une réflexion sur le temps qui passe où la vacuité de l’existence, ou encore sur l’absurdité de la guerre à notre époque, non non, ce serait trop demandé. C’est rien de tout ça. C’est Juste du rien.


Les personnages sont détestables, aucune empathie n’est rendue possible envers ces jeunes soldats arrogants et sans textures. Particulièrement mal écrit il ne dégage rien d’eux, à l’image d’un métrage qui tourne à vide, essayant de trouver ici et là une image qui ‘’claque’’ ou un plan qui ‘’en jette’’. Entre ces vaines tentatives à la recherche d’un esthétisme outrancier, les comédien.nes sont laissés livrés à eux-mêmes.


Jamais le public n’est mis au courant de ce qu’il se passe. Il y a bien à un moment une fusillade, donc la présence de belligérants, il y a une prisonnière qui parle anglais, quand tout le monde est hispanophone, il y a une armée avec une hiérarchie, mais rien n’est précisé. Tout est flou, aléatoire et faisandé, mettant à jour les trous béants d’un scénario quasi inexistant. Cela se perçoit durant les séquences où les acteurices sont filmés en train de faire n’importe quoi.


De plus, le métrage est particulièrement vulgaire. Dans son visuel tape à l’œil, mais aussi dans ses idées de mises en scène. Cette vulgarité ressort énormément dans la manière dont Alejandro Landes à de filmer ses personnages. Appuyant leurs défauts physiques, comme pour souligner que ce sont des vrais gens, avec des vrais gueules. Sauf que ça ne prend pas, tout étant tellement stylisé, au service d’un visuel désagréable et sans ampleur.


Et ça continue comme ça durant de longues minutes. Alors l’envie de couper court est bien entendu très présente, mais on est jamais à l’abri d’un sursaut. Donc on s’accroche, on espère, et en fait ça ne vient jamais. C’est un peu comme si le film refusait de démarrer réellement, laissant sans cesse son récit en suspens, sans que rien offrir de plus sur l’univers.


Ce dernier tente de reprendre une idée présente dans ‘’Mad Max Fury Road’’, qui témoigne du manque d’originalité flagrant de l’ensemble, qui est de faire figurer des éléments de la culture populaire pour ancrer un futur fantasmé directement dans la continuité de notre contemporanéité. Des personnages portent ainsi les noms de Schtroumpf ou bien Rambo… Mais en fait, ça ne fait pas vraiment sens, puisque l’univers est inexistant.


Il est impossible de se projeter dans ‘’Monos’’, qui hésite toujours entre l’œuvre contemplative ou réflexive. Deux caractéristiques qui font d’ ‘’Apocalypse Now’’ l’un des plus grands films de guerre jamais réalisé. Je retente là l’analogie quelques instants, afin d’essayer de comprendre pourquoi le film de Coppola est cité en comparaison, pour inscrire ‘’Monos’’ en digne successeur.


Dans ‘’Apocalypse Now’’ il y a un fond : la Guerre du Vietnam. Il y a une quête : retrouver le colonel Kurtz. Il y a un parcours initiatique : plus Willard en apprend sur l’homme qu’il chasse, plus il se projette en lui, et se perd comme dans ce fleuve interminable, qui sert de parabole. :e film de Francis Ford Coppola est la lutte interne d’un homme avec lui-même. C’est une aventure introspective magistrale, grandiose par le fait de ses décors naturels et de la débauche de moyens déployés.


Chez Alejandro Landes, il n’y a rien de tout ça. Il n’y a aucune toile de fond qui permette de dessiner des enjeux. Il n’y a pas de personnages qui sortent plus du lot que les autres. Ils sont tous des plus insipides. Seul Rambo est vaguement intéressant, puisque Landes essaye de le rendre plus humain que ses camarades. Mais il n’est absolument pas exploité. Devenant tout aussi anecdotique que l’ensemble de ce très mauvais film.


Pour exemple de la misère dont il témoigne, à un moment, vers la fin, Alejandro Landes n’essaye même plus d’essayer de raconter quelque chose. Il se met à filmer l’eau. Il y a dans le métrage, quelques plans sous-marins, alors peut être que dans une volonté de rentabiliser la location de l’équipement il se met à filmer l’eau. Durant plusieurs minutes, ou du moins ça paraît être plusieurs minutes. Et il ne se passe rien. Juste de l’eau qui suit son cours.


Et le film se termine sans que nous ayont appris quoi que sur ce qu’il s’y passe. Il n’y a aucun enjeu, aucun propos, rien. Qui sont ces jeunes ? Pourquoi sont-ils en guerre ? Quelles sont les raisons du conflit ? Pourquoi ont-ils une prisonnière anglophone ? Pourquoi passent-ils leur temps à l’humilier ? Qui est ce sergent instructeur qui vient leur crier dessus et filmer la prisonnière ? Qu’est-ce qu’il se passe ? Que raconte le film ? Et bien nous en saurons pas plus…


Quasi une antithèse du cinéma, ‘’Monos’’ à tout de l’arnaque cinématographique. Et pour conclure, voici une petite paraphrase de Karim Debbache, en des mots pleins de sagesses :



‘’Le mot cinématographie vient de ‘’Kinema’’, qui veut dire mouvement, et ‘’Graphie’’ qui signifie écrire, Cinématographie = écrire avec du mouvement. Si vous avez quelque chose à dire au cinéma, ne le dite pas, montrez-le.’’.



Sauf que force est de constater que ce film ne montre rien, et c’est à peine si il dit quelque chose. Là, comme ça, tout de suite : à oublier.


-Stork._

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le 10 mai 2020

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