Alors moi, sur le papier, ce film je lui dis « Banco » ! Faire une comédie grand public en osant enfin tacler dans les tabous identitaires les plus vivaces, en France, c’était là plus qu’une bonne idée, c’était une nécessité ! Mais bon... Malheureusement, dans la vision de Philippe de Chauveron, grand public veut surtout dire « petits vieux » et aussi « personnes prêtes à rigoler de religion et d’identité mais à condition qu’on ne heurte personne ! » Parce que oui, dans ce film, pas question de bousculer les mœurs ni les certitudes. Le Juif est forcément pingre et d'une bigoterie exubérante ; le chinois pratique forcément le kung-fu et s’y connait en affaire ; j’en passe et des meilleures... Le paradoxe de ce film, c’est qu’il entend diffuser un message de tolérance en renforçant le plus de clichés possibles sur les noirs, les arabes, les cathos... Le pire, c’est que je pense que pour les gens qui n’ont jamais vécu la mixité culturelle et qui sont pétris de tabous et de préjugés sur ces questions, ce film doit certainement marcher du tonnerre sur eux. Dans ma salle, les gens étaient pliés de rire. Qui se marraient ? Les petits vieux ; les couples coincés du cul fringués de manière austère... Moi-même, je dois bien reconnaître que j’ai été assez sensible à l’aspect « comédie sans prétention » mais aussi à cette nostalgie à l’égard des vieilles comédies populaires des années 1960-1070. J’aurais sûrement pu passer un bon moment si les ressorts burlesques n’avaient pas été aussi caricaturaux et si le jeu d’acteur n’avait pas été aussi didactique et artificiel. Mais bon, je pense qu’au final il ne faut pas se voiler la face : ce film est un film générationnel et culturellement marqué. Si vous ne faites pas partie de la vieille France profonde ; si vous n’êtes pas marqué par cette culture du tabou communautaire ; il y a de fortes chances pour que ce « Bon Dieu » vous semble tout droit issu d’un autre âge et qu’il suscite chez vous autant une forme de sympathie condescendante qu'une certaine forme d'affliction...