Circonstances atténuantes

On est dans un centre d'appels téléphoniques de la police danoise et on n'en sortira pas pendant tout le film. Un des agents en service reçoit un appel au secours d'une femme qui vient de se faire enlever et que le kidnappeur emmène à bord d'un véhicule vers une destination inconnue.
Pendant les 85 minutes du film, la caméra va rester fixée sur cet agent (un policier provisoirement muté dans ce centre d'appels) et on va suivre les efforts de celui-ci pour appréhender la situation d'urgence à laquelle il est confronté, tenter de localiser l'appel, faire arrêter le véhicule du kidnappeur et sauver cette femme qui l'a appelé au secours.
Puisque, visuellement, on reste cadré sur le policier-téléphoniste sans jamais sortir du centre d'appels, tout le déroulement de l'opération passe essentiellement par les oreilles, la bande-son. C'est l'originalité de ce thriller : on reconstruit mentalement toute l'histoire à partir de ce qu'on entend , non seulement les échanges verbaux entre les différents protagonistes mis en jeu, mais également les bruits de circulation, coups de frein, klaxons, etc. Il n'y a pas de musique, sinon quelques notes vers la fin du film.
Sur la durée, les échanges se font essentiellement entre le policier-téléphoniste et la femme enlevée, mais il converse également, toujours par téléphone, avec la petite fille de cette femme, avec le kidnappeur, avec différents services de police, avec l'agent avec qui il fait équipe d'ordinaire sur le terrain, quand il fait son job normal de policier.
Au fur et à mesure du déroulement du film, nous acquérons une vision de plus en plus précise de l'ensemble de la situation, laquelle connaît un certain nombre de rebondissements inattendus qui l'éclairent de façon complètement différente de celle qu'on avait au départ, tout en lui gardant son côté dramatique. Petit à petit, on réalise que ce policier, si calme et maître de lui dans son opération de sauvetage de cette femme en détresse et aux dernières extrémités, est lui-même dans une situation extrêmement délicate, la proie d'un cas de conscience dramatique et que son acharnement à sauver cette femme lui est très probablement dicté par un immense sentiment de culpabilité (inavouable ?).
L'acteur (Jakob Cedergren) qui joue le policier-téléphoniste occupe l'écran 98% du temps et il est excellent. Il a un joli regard bleu limpide, qu'on ne remarque qu'à la toute fin du film quand, pour sauver cette femme, la maintenir en vie, il tente le tout pour le tout, lui dit sa vérité (se mettant lui-même en grand danger) et qu'alors il fixe la caméra "droit dans les yeux".

Pour ma part, j'accorderai certainement les circonstances atténuantes à The Guilty (je veux dire : à ce Coupable).
C'est un thriller (signé Gustav Möller) d'excellente facture et qui, cependant, exige du spectateur une attention soutenue. Il entre dans cette catégorie de films qu'on a plaisir à voir, mais qu'on a, bizarrement, peu envie de revoir.