En plaquant l’œuvre sur le biographique, Tolkien échoue totalement à dire quelque chose et de son romancier éponyme et de l’univers mythologique que ce dernier compose. Bousculée inutilement par un jeu de sauts temporels, l’intrigue chronologique oublie de penser l’écriture de fiction comme un exorcisme, comme l’occasion de coucher par écrit un mal en le défigurant, en l’amplifiant, si bien que fantastique ne parle qu’au spectateur et non pas au protagoniste principal : nous retrouvons dans ces ombres de dragons ou dans ce géant de feu des visions sublimées par Peter Jackson dans sa trilogie du Seigneur des Anneaux, mais qui s’avèrent ici hors-sujet. Hormis la qualité esthétique de certains plans, notamment un trou de sang creusé dans les trachées autour duquel gisent des soldats par dizaines, l’ensemble fait se succéder des petites scènes incolores et inodores qui peinent à révéler le talent des acteurs, cantonnés à jouer des rôles stéréotypés et à prendre des poses toutes plus forcées les unes que les autres. La partition musicale de Thomas Newman enveloppe le film d’un onirisme teinté de mélancolie plutôt réussi, seule véritable intervention de l’art au sein d’un exercice scolaire anachronique guère désagréable, mais fortement dispensable, et qui rend un bien pâle hommage au génie de l’auteur de la Terre du Milieu.