Buddy double
Faux premier film de Jesse Eisenberg, « A real pain » semble céder, presque caricaturalement, à la tentation de l’auteur « jeune », mu par la volonté d’aborder toutes les thématiques qui lui sont...
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le 25 févr. 2025
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A Real Pain commence comme un road-movie classique avec deux cousins que tout oppose — le bon vieux duo comique du maniaque anxieux et du glandeur foutraque mais charmant — mais s'oriente vite vers quelque chose de plus dramatique. Après la mort de leur grand-mère, David et Benji partent pour un « pèlerinage » sur ses traces en Europe de l’Est, au sein d’un tour organisé pour des Américains visitant des camps de concentration. Une sorte de tourisme mémoriel qui, vu d’ici, a parfois des airs de cours d’histoire en mode all-inclusive, mais qui sert surtout de toile de fond à l’exploration de leur relation.
C’est là que le film trouve toute sa force. David, l’archétype du type bien rangé et angoissé, fait tout « comme il faut » alors que Benji, électron libre bruyant et imprévisible, refuse toute convention. La dynamique est familière, mais Jesse Eisenberg joue sa partition habilement. Elle permet également les notes d’humour absurdes du film, comme cet arrêt de train raté parce que David dormait si bien. Il y a cette réplique qui résume tout : David dit que tout le monde va détester Benji pour ses frasques, mais c’est pourtant de lui qu’on se souviendra. Et il a raison. Benji est insupportable, solaire, vulnérable — une vraie plaie qui pourtant captive par son aura et son charisme. Le film capte parfaitement ce mélange de jalousie et de tendresse qui peut exister entre deux proches. David envie la liberté de Benji, sa capacité à s’affranchir des règles, même si cela le rend ingérable. Benji, lui, envie la stabilité de David, tout en méprisant son côté « premier de la classe ». Cette tension est palpable et portée avec brio par Kieran Culkin et Jesse Eisenberg, tous deux impeccables. Mention spéciale à Culkin, capable de faire coexister chaos et fragilité avec une aisance déconcertante.
Cette dualité entre admiration et exaspération, amour et rejet, résonne de manière universelle. Elle est typique des relations familiales réelles ou symbolique (car deux amis peuvent atteindre cette symbiose), avec un lien inaltérable, forgée par une jeunesse commune, et un fossé qui s’élargit ou se referme dans cette dynamique pendulaire du « je t’aime moi non plus ». Cette dynamique, on la connait tous, et le film la fait résonner avec une grande authenticité.
Le double sens du titre est un coup de maître : A Real Pain, c’est à la fois la « vraie souffrance » et la « vraie plaie ». Le film s’ouvre et se ferme sur la même scène, un plan miroir qui magnifie ce jeu de mots et souligne parfaitement la nature de Benji. C’est simple, subtil, et brillant. (Oui, j’aime les génériques qui racontent quelque chose)
Pour le reste, c’est honnête mais sans éclat. Très clairement l’ambition du réalisateur est concentrée sur cette relation. La mise en scène est correcte, la galerie de personnages secondaires fait le job sans marquer les esprits, et le voyage en lui-même est davantage un prétexte qu’un moteur narratif. Ce n’est pas révolutionnaire, mais pour un deuxième film, Eisenberg prouve qu’il a une vraie sensibilité et qu’il sait diriger ses acteurs. Pour moi, le film touche par sa justesse et sa simplicité, et est à la hauteur d’une ambition modeste mais sincère.
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Créée
le 16 févr. 2025
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