Pas le genre de film à regarder si on est déprimé. Sur le fond comme sur la forme, le film est d'une redoutable cohérence : tout est sombre et sans espoir. Entre l'image aux couleurs hivernales (marron, surtout), la musique de film d'horreur et les personnages glauques, le réalisateur propose un film à l'atmosphère lourde et dépressive, comme contaminée par le désespoir et l'abrutissement des personnages. Ça ne plaira pas à tout le monde, mais on peut trouver un certain charme à cette ambiance engourdie et cette esthétique hivernale. Ceux qui s'attendent à un thriller avec de l'action risquent d'être déçus.
On est dans la campagne profonde américaine, laide et boueuse, celle des white trash, des laissés pour compte. L'Amérique des motels miteux, des patelins moches et des mobil-homes de fortune. John Moon vit dans un de ces mobil-homes, en lisière de forêt. Désespéré depuis que sa femme l'a quitté en emmenant son fils, il survit en braconnant dans la forêt voisine. Sa vie bascule un matin, quand il abat une jeune fille par accident. Il aggrave encore sa situation en emportant une boîte pleine de billets qu'il trouve dans les affaires de la défunte. De chasseur, John va devenir gibier, traqué par les propriétaires du magot qui cherchent à le récupérer.
Si ce film lent et neurasthénique arrive à captiver, c'est avant tout grâce au charisme de Sam Rockwell, acteur qui ne déçoit jamais - contrairement à ses films parfois. Quasiment muet et le visage fermé, il porte ce film à bout de bras avec intensité et sensibilité. Il y a quelque chose de poignant dans son regard, une volonté déclinante de se battre, une tristesse résignée, qui fait penser à celle d'une bête prise au piège qui continue de se débattre par simple réflexe. Dans le regard de John Moon, on lit la certitude que tout est déjà perdu depuis longtemps, mais qu'il faut quand même continuer à vivre.
Pour peu que vous aimiez Sam Rockwell, les ambiances déprimantes et hivernales, ce film peut vous plaire, et même vous envoûter.